@Johr Leander & @Izan Vétalàs & @Aslaug Ithildin

Une brume épaisse s’est à nouveau emparée de Til Garhyt, comme si la cité portuaire plongeait dans les vapeurs miasmatiques de l’Enfer pour masquer les horreurs de la nuit. « Récupérer cet artefact sera un jeu d’enfant », avait assuré Johr à Aslaug. Le mercenaire royal ignore si l’objet entré en possession du riche marchand possède d’authentiques vertus magiques, mais cette mission est un excellent moyen de gagner en prestige au sein du culte du bélier. Ainsi qu’en influence auprès de sa ténébreuse Grande Prêtresse, dont il ne se lasse pas d’observer la fine silhouette chevauchant à sa gauche.
Aslaug lui rappelle beaucoup son épouse, ce qui n’est pas pour lui déplaire. Une Hera brune et moins détestable, aux pouvoirs aussi stupéfiants qu’incertains. Johr ne cesse de s’interroger : pourquoi son destin s’est-il étroitement lié aux deux Grandes Prêtresses les plus obscures d’Elenath, s’il n’est pas lui-même l’élu de Legnar promis à un grand et sombre avenir ?

À sa droite, Izan ignore les réflexions spirituelles de son vieil ami et entretient la conversation, une main tenant la bride de son cheval gris. Un mercenaire fiable et loyal, qui malgré leur apparence dissemblable lui ressemble comme un loup né de la même portée.

— Nous y sommes, décréta Johr. C’est la grande bâtisse qu’on distingue devant nous. On va fêter comme il se doit le retour à la maison, n’est-ce pas Izan ?

Johr coule un regard complice au Corbeau, lui aussi natif de Til Garhyt. Une vaste demeure en pierre sombre se dresse dans la pénombre, nimbée d’un énigmatique manteau de brume. À l’abri d’un mur d’enceinte, on distingue la partie supérieure de piliers anguleux soutenant une façade ouvragée de motifs indiscernables. Deux gardes sont postés devant un portail de fer forgé.

Faisant preuve d’une galanterie intéressée, Johr aide Aslaug à mettre pied à terre. Il sait que la voyageuse infatigable a parcouru plus de lieues que maints cavaliers, mais joue son rôle de partisan dévoué qui prend les choses en main.
Izan a repéré l’endroit idéal pour attacher les cheveux. Discret, mais assez proche pour prendre rapidement la fuite en cas d’imprévu. Une patrouille pourrait passer dans les environs et surprendre les hurlements cris qui vont bientôt jaillir de gorges meurtries…

Johr fixe sa longue épée à son dos, camoufle une dague sous un pan de sa tunique.
Son regard gris se rive sur Aslaug, étincelant d’une malveillance sauvage. Un sourire chargé d’horreur se dessine entre ses mâchoires puissantes.

— Kendassa peut se réjouir, les sacrifices vont commencer.

Il détache une outre de vin de son cheval. Remplit sa bouche du liquide sucré, qu’il agite longuement avant de déglutir. Puis il passe un bras autour de l’épaule d’Izan, glisse l’outre entre les mains de ce dernier. Son haleine est chargée de vapeurs d’alcool.

— On leur fait le coup des pauvres types avinés ?

Johr désigne les gardes fantomatiques d’un geste de la tête. Deux imbéciles qu’il sera facile d’approcher en se faisant passer pour des compagnons de beuverie. Au moment où ils réaliseront avoir affaire à deux combattants expérimentés, il sera déjà trop tard pour eux.