« Je ne vous parlerai pas de vengeance, de guerre, de lutte et de sang.Je ne vous parlerai pas non plus d'injustice et de droit. Je ne vous parlerai même pas de ces gens qui font rimer ordre et terreur, lois et mensonges, morale et déchéance. Je veux vous parler de cette lumière qui brille en chacun de nous. Cette petite lumière qui fait de chacun de nous un être humain. Parce que cette lumière est en train de s'éteindre. »
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« voyage en compagnie d'un vil serpent. il me tarde de lui faire ravaler ses couleuvres une bonne fois pour toute. »
Les murs protecteurs de l’Écrin Doré semblent être un lointain souvenir. Les iris perdues dans le paysage aride du désert tigré, Talia se languit presque de ces soupires rauques, de ces gémissements d'extase, de ces caresses langoureuses sur son corps de femme. Elle rêverait de retrouver le satin de ses draps, la chaleur d'un corps offert le temps d'une nuit. Même la solitude devient un rêve, un idéal qu'elle tente d'attraper à bout de bras, mais qui reste insaisissable. Elle veut fuir, loin, bien loin. Retrouver l’Écrin Doré. Retrouver son confort. Retrouver ses filles et ses fils. Retrouver Garth. Oh, oui. Garth aurait dû venir avec elle, elle aurait dû accepter sa proposition. Sotte qu'elle est ! La simple pensée d'avoir son second à ses côtés parvient à lui réchauffer son cœur glacé par l'ennuie. Les traits de son second apparaissent dans son esprit troublé alors que la présence d'un intrus la ramène à la réalité. Akam.
Sa voix transperce, tonne tel un orage en plein ciel d'été. Dure. Indomptable. Elle brise avec une certaine férocité l'ambiance électrique qui règne en maîtresse dans cet environnement confiné qui la retient prisonnière depuis de longues heures. « Arrête. Cela suffit. » Talia retient son souffle, ses mots, sa rage qui nourrit ses entrailles et qui déverse sa bile infecte au fond de sa gorge serrée de frustration. Elle détourne son regard enflammé vers l'extérieur de la calèche à la recherche de quelques paysages intéressants. Rien. Plus rien depuis trop longtemps. Des plaines arides à perte de vue, et ce vil pourceau qui lui tient compagnie. Elle ne veut plus croiser ce visage supérieur, cette tignasse sauvage qui ne fait que lui rappeler sa servitude. Chacune de ses paroles n'est qu'un déversement d'arrogance. Celui qui fut un temps un amant de choix, est devenu son créancier. Quel destin pour cette paire infernale, pour ces deux êtres pour qui la sauvagerie de leurs ébats s'est transformée en joute verbale constante.
Cette folle aventure est née il y a quelques semaines, d'une lettre cachetée glissée innocemment sur son bureau. Celle d'un Roi aux ambitions dévorantes. Un projet insensé et faramineux. Les Dionysies. Instant fabuleux durant lequel l’Écrin Doré deviendrait le centre de tout un royaume. Lieu de fête et de débauche en l'honneur de la vie, de l'amour, de la dépravation. Tout le monde sera présent. Tout le monde pourra admirer la réussite de cet établissement et celle de ses propriétaires. Talia. Akam. Deux entités opposées farouchement à l'entente cordiale. Le feu. La glace. La sauvagerie incarnée en ces deux anciens amants que désormais tout oppose. Les voilà à nouveau réuni dans cette modeste calèche, comptant les heures qui les sépare de leur retour sur les terres de Gwelnaurs.
Une main dans sa chevelure sombre, la belle se laisse rattraper par les récents événements qui les ont opposé dans la forteresse de Merilyan « Je reste convaincue que le grenat sied mieux aux filles que le coquelicot. C'est d'un vulgaire. Sincèrement je prie pour que la cargaison brûle en cours de route. » Marmonne-t-elle, le visage toujours rivé vers l'extérieur, pour ne pas croiser celui d'Akam. « Je regrette de ne pas avoir réussi à partir avant toi. » Un soupire las anime sa poitrine et vient s'échouer sur un morceau de toile. Talia en vient presque à regretter ce temps où, tous les deux réunis, le mot respect existait encore. A coup de baisers. A coup de reins. Akam se contente désormais de la tourmenter, nuit et jour, dans un jeu vicieux dont il est le maître incontesté.
- A qui crois-tu parler ? Surveille ton langage quand tu t'adresses à moi. Cela suffira quand je l'estimerai nécessaire et ce n'est sûrement pas à toi d'en décider.
Comment ose-t-elle m’interrompre ? Mes lèvres pincées, je la foudroie d'un regard assassin où dansent déjà les flammes de la colère. Enfermée avec moi dans cette calèche, elle n'a pourtant pas le loisir de s'échapper, comme elle le fait continuellement d'habitude, louvoyant comme un maudit serpent. Je compte bien poursuivre inlassablement cette discussion et en profiter pour la pousser dans ses retranchements. Va-t-elle finir par admettre ses torts, pour une fois ? Diantre, son orgueil est si épais qu'il devrait suinter par tous les pores de sa peau. Mais au fond d'elle-même, elle se mortifie puisqu'elle sait que j'ai raison, tout comme elle sait qu'elle n'est qu'une ignoble garce, manipulatrice et corrompue. N'a-t-elle pas fait exprès de m'aguicher durant tout le voyage avec ses poses lascives et ses rires cristallins ?
J'ignore exactement depuis combien de temps nous avons quitté la forteresse de Merilyan, mais le voyage de retour me parait bien plus long et détestable que l'aller. Nous étions si enthousiastes à l'idée d'organiser cette fantastique réception que j'avais presque cru retrouver cette alchimie qui nous liait autrefois et nous conduisait avec passion au creux des draps, pour des nuits embrasées. Mais à présent, l'ambiance est si tendue que je crois ressentir la noirceur de l'orage peser sur nos têtes, comme si un lourd nuage s'était mis à nous suivre obstinément. Pourtant, le paysage qui défile ne laisse apparaître qu'un ciel dégagé dont la luminosité commence déjà à décroître alors que le soleil descend doucement à l'horizon. Mais je me moque bien d'observer les alentours, contrairement à elle qui évite mon regard, chose que j'ai en horreur. Et pendant que je cherche à capter ses yeux de braise qui se refusent si détestablement aux miens, je regrette de ne pouvoir passer ma propre main dans sa chevelure sombre et en respirer le parfum de luxure. C'est un rire sarcastique qui m'échappe à ses commentaires, un rire sec et coupant comme des cisailles.
- Moi qui pensais que tu te complaisais dans la vulgarité, voilà qui m'étonne. Tu peux bien prier pour que tout parte en cendres mais dans ce cas, qui paierait la nouvelle cargaison ? L'ingratitude n'incite pas les riches mécènes à se montrer généreux.
Tiens, je voudrais bien voir cela. Qu'elle soit ruinée à cause de sa nature capricieuse et qu'elle en vienne à me supplier de l'aider, une fois encore. L'imaginer à genoux en train de m'embrasser les pieds m'est fort plaisant, et cette simple idée apaise une part de mon agacement, tandis que je caresse son corps du regard, à défaut de rencontrer le sien. Elle prétend regretter de ne pas être partie avant moi et d'éviter ainsi cette proximité pendant notre voyage, mais je sais parfaitement que c'est faux. Ma mâchoire se crispe insensiblement, muré dans une expression hautaine sans que je ne cesse de la dévisager, une vague incertitude au fond des yeux alors que je vois sa poitrine se soulever, d'une manière si lasse. Le regrette-t-elle vraiment... ?
- Le grenat est bien trop sombre pour l'ambiance tamisée de l'Ecrin doré. C'est une question de bon sens de préférer la couleur éclatante du coquelicot pour mettre en valeur les filles. Surtout dans la grisaille si triste de notre ville.
Mais je ne vois même pas pourquoi je me donne la peine de lui donner des cours d'esthétique. Qu'a-t-elle a dire là dessus ? Rien, le choix est fait et bien fait. Mais loin de me remercier, elle n'est capable que de critiques. Je m'interrompt quelques secondes, appuyant sur elle un regard lourd, avant de pester.
- M'écoutes-tu seulement ?
M'avançant subitement vers elle, j'attrape son menton entre le pouce et l'index, d'un geste autoritaire, la contraignant enfin à retourner son attention vers moi. Cette fois, elle ne peut plus faire autrement que d'affronter mon regard, tandis que mon visage s'approche dangereusement du sien.
- Ne prétend pas que le paysage te fascine. Tu serais morte d'ennui en voyageant sans moi...
(c) DΛNDELION
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Jeu 26 Mar - 3:23
une expédition sauvage
akam & talia
« voyage en compagnie d'un vil serpent. il me tarde de lui faire ravaler ses couleuvres une bonne fois pour toute. »
Lèvres délicieusement retroussées. Mâchoire contractée dans une expression de sévérité. L'agacement s'infiltre insidieusement sur ses traits fins alors que les paroles du mécène, dures, cassantes, tranchantes, viennent s'échouer dans le creux de ses oreilles. Insupporté par tant d'arrogance et de défiance, le mâle s'est empressé de rappeler sa place à celle qui se trouve en face de lui, faisant claquer le fouet invisible de l'autorité sur ce visage de porcelaine qui ne cesse de l'éviter. Le voyage semble beaucoup trop long pour ces deux créatures du vice qui continuent de se provoquer, inlassablement. Les frictions incessantes, illustrées à travers cette chasse qu'ils se livrent sans relâche, semble rappeler sans une certaine ironie cette passion ardente qui a toujours brûlé entre eux. Le feu. La glace. Elle l'évite, ce regard brûlant de désir qui la dévore depuis de longues heures déjà. Le menton rivé vers l'extérieur. Le visage désespérément muré dans un faux désintérêt qui feint presque le théâtralisme. La belle ressemble trait-pour-trait à une gamine insolente qui tente d'attirer l'attention de son interlocuteur adulte.
La maturité de son jeune âge, solidement fixé sur cette somptueuse poitrine prise au piège dans sa prison de soie, Talia se contente d'ignorer le rappel à l'ordre de son généreux mécène dans un silence insolent. Telle une bête sauvage qui ne souffre d'aucune captivité, à jamais indomptable et traquée, elle maintient ses positions. Le visage baigné des reflets safranés du soleil couchant, la belle matrone se plait à rêver à une douce libération de ses entraves, la ramenant naturellement entre les murs protecteurs de sa propre maison. Près de ses proches. Près de ses amis. Près de lui. La voix cassante du mâle vient pourtant la rappeler sur terre, l'arrachant brutalement à ses rêveries lascives.
Malgré tout attentive aux divagations de son partenaire de voyage, la jeune femme ne peut retenir un rire forcé à l'écoute de ses dernières paroles. Le rictus qui, au même moment, étire ses lippes, creuse un peu plus cette adorable fossette qui naît dans le coin de sa bouche. La femme fatale devient, durant l'espace d'un bref soupire, une enfant impertinente qui se moque ouvertement de son interlocuteur. Consciente que l'escalade verbale peut vite devenir incontrôlable, Talia préfère ne pas répondre à ce qu'elle considère comme de la pure provocation. Elle se tait. Continue de dévier ces appels muets qui émanent de la stature imposant du séduisant mâle qui se trouve devant elle, qui ne cesse ne lui rappeler qu'il est celui qui paye, et donc celui qui décide. Akam. Maître incontesté, prince dans son propre royaume idéalisé, continue d'imposer avec fermeté une ligne de conduite stricte et rigide à celle qui, fut un temps, ne pouvait se passer de ses conseils. Ce dernier ne tarde d'ailleurs pas à exposer les raisons de son choix de tissu à celle qui l'a précédemment contredit, comme pour lui souligner avec candeur la discordance de son raisonnement.
Fin observateur. Fin connaisseur de la créature qui le nargue par son ignorance. Akam comprend rapidement que sa partenaire de voyage ne répondra pas à ses piques verbales. Elle se tient là, dans l'ombre d'un morceau de toile, les traits à peine illuminés par les derniers rayons du soleil couchant. Seule sa poitrine et ses longs cils semblent parvenir à animer la statue de cire qui se tient sagement assise. L'homme, habitué à être traité comme un homme d'importance, ne tient pas face à tant d'ignorance. Soudain, la belle entend la banquette en bois craquer et son menton est presque immédiatement pris au piège dans la poigne ferme de son interlocuteur qui l'oblige à le regarder dans les yeux.
Sa voix gronde tel un orage menaçant. Cette fois-ci prise au piège, forcée de tourner son visage offusqué dans sa direction, la belle sauvageonne ne peut plus ignorer Akam. Si près de lui, son souffle chaud s'échappe de ses lèvres entrouvertes pour venir mourir contre celles de son mécène. Immobile. Ses iris ténébreuses plongées dans les siennes. Le temps semble momentanément s'arrêter pour ses deux créatures qui se toisent avec insistance. Soudain, ses lippes gourmandes qui s'apprêtent à se frôler contre ses jumelles qui lui font face se mettent à se mouvoir dans un murmure à bout de souffle. « Tu es bien présomptueux, Akam, pour prédire de telles inepties. » Son ton est lent, presque langoureux tant ce regard qui le dévisage est noyé par la passion. « A moins que ce soit toi qui espère le contraire. Même si je pense que tu aurais rêvé que je te lime ta queue durant tout le voyage, rien que pour te rappeler à quel point je te suis redevable. N'est-ce pas ? » Un long silence investi la calèche. Le sourire de la belle s'écarte au fil des secondes, jusqu'à ce qu'elle vienne conclure sur ce même ton provocateur et enjôleur : « Je suis certaine qu'en plongeant ma main dans tes braies, j'aurai ma réponse. Qu'en penses-tu ? » Sur ces mots, elle vient elle-aussi apposer sa main sur sa mâchoire, imitant à la perfection cette forme de domination machiste qu'il tente de lui imposer. La provocation est grande. Cruelle. Elle aime ça. Ce jeu de pouvoir qui la lie à son mécène. « Si tu ne me lâches pas, je vais hurler. » Son regard est pourtant pétillant malgré la menace qu'elle lui murmure dans le creux des lèvres.
Lun 23 Mar - 13:54
