« Je ne vous parlerai pas de vengeance, de guerre, de lutte et de sang.Je ne vous parlerai pas non plus d'injustice et de droit. Je ne vous parlerai même pas de ces gens qui font rimer ordre et terreur, lois et mensonges, morale et déchéance. Je veux vous parler de cette lumière qui brille en chacun de nous. Cette petite lumière qui fait de chacun de nous un être humain. Parce que cette lumière est en train de s'éteindre. »
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▬ L'ENVOL : le silence et la nuit, l'aigle qui déplie ses ailes, chaparde aux grands de ce monde, voleur hécatombe. ▬ LES PARCHEMINS : 239 ▬ L'AME : savage, cyrielle. ▬ LE REGARD : b. cumberbatch. ▬ LE TEMPS : la quarantaine bien tassée, le fil des années. ▬ L'ETOILE : libre. vagabondant. ▬ LE SANG : nulle allégeance n'a ton coeur - qui suit l'or sonnant et trébuchant. ▬ LE FEU : vagabondes d'un soir. ▬ LE DESTIN : marchant itinéraire et tes étals sur lesquels brillent les gemmes au soleil. officieusement, voleur, chef d'une guilde de scorpions. ▬ LE PACTE : le scorpion, poison dans ses veines. ▬ LES ROSES : 3909
La nuit commence à étendre sa puissance sur le continent d'Elenath tout entier. La lune prend la relève du soleil, elle s'élève, tout là-haut, illuminant de ses quelques rayons les arbres qui les entourent. Les étoiles parachèvent ce spectacle qui t'a toujours vu grandir, t'élever, naître et tomber. Elles adoucissent la lumière qui vous entourent, vous enveloppent, maigre cocon de tendresse avant ce qui vous attend, le casse du siècle. Car il y a du gros benêt, dans ce château, dont les quelques fenêtres superbement dorées commencent peu à peu à s'illuminer des fugaces éclairs rougeoyant de bougies incandescentes. Il y a de l'argent, là-dedans, beaucoup d'argent sonnant et trébuchant, volé à d'autres plus pauvres que soi, volé à d'autres dans le besoin le plus essentiel, qui déjà galèrent rien qu'à se nourrir eux et toute leur ribambelle d'attardés. Il y en a, de l'argent. Et cet argent, tu comptes bien l'assainir, après qu'il ait été tant gangrené. Des mains purulentes et dorées qui s'en saisissent, comme de joyaux, de bijoux, comme les gemmes magnifiées que tu vends dans les marchés sur ton étal superbement boisé. De ces nobles que tu prends plaisir à dépouiller, tant leur arrogance est surjouée, tant leur bonne étoile s'est moquée d'eux, leur donnant l'impression d'opulence quand tu te trouves là, pas loin derrière, à les en priver.
La voix d'Asmodee que tu entends, derrière-toi, qui te sors de cet état des lieux que du regard tu perçois. Elle donne des ordres, te seconde dignement, ainsi qu'elle l'a toujours fait, te permettant un repos bien mérité après les coups que t'as si longuement préparé. Certains mettent des semaines, des mois à voir le jour, et les derniers instants sont pour toi les plus angoissants, tant ton esprit vagabonde sans cesse à la recherche de ce qui pourrait foirer. Til Garhyt. Sa brume perpétuelle que la lune tente vainement de percer de ses rayons, sa brume qui vous enveloppe, sert évidemment vos projets, vous fondant dans le décor. Un gros château à cambrioler, une casse préparée depuis des semaines, tu as peur, tu as cette peur qui brille en ton cœur et que tu tentes de cacher pour tes scorpions qu'il ne faut pas paniquer. Mais, véritablement, tu as la peur au creux des reins. Seule Asmodee est apte à le voir, au frétillement de ton sourcil droit. Ton visage est une tombe, inapte à démontrer quoi que ce soit, mais elle a ce regard, ces prunelles qui voient tout, virevoltantes d'un coin de ton masque à un autre.
Je serai toujours avec toi. Où que tu te trouves, quoi que tu fasses, je serai là. Toujours. Tu avais placé ta main sur sa poitrine. Tu te rappelles votre rencontre, ces premières fois où tu as tenté de la sortir de l'enfer dans lequel elle s'était entraînée, bien aidée par les coups durs de la vie, de ce cruel destin qui lui avait fait vivre tant d'absurdités. Tu te rappelles tes mots de soutien, tes mots d'amour, quelque sorte, qu’implacable, tu l'abreuvais de ta voix douce et suave, de celle qui t'empêche de commettre l'irréparable. Elle avait été réceptive, Asmodee. Là. Tu serais là, toujours, avec elle. Quoi qu'il advienne. De petite fille chétive à sauver de sa propre folie, elle était devenue amie, confidente, sœur, même. Gravissant les échelons avec une agilité sans faille, leste et lascive, elle avait tout du scorpion d'excellence, véritable effigie de la guilde qui était tienne. Ta seconde. Ce piédestal sur lequel elle s'était hissée, tant dans votre groupe que dans ton cœur, là, quelque part en toi, Arthur, sans que tu ne saches vraiment définir - placer les bons mots, entre vous. Que le silence. Le silence, lourd, des non-dits. Ce silence, dans lequel, elle et toi, vous vous noyez. Nul bruit sur vos pas.
▬ Asmo. Il faut y aller. Toujours cette voix douce, cette voix que rien ne trahit, dans laquelle ne perle ni peur ni terreur. Et pourtant. S'ils savaient. Cela t'amuse, de pouvoir chaque jour porter des masques, sans qu'aucun d'eux ne te connaisse vraiment. Et pourtant, chacun d'eux a touché ton cœur, profondément. Douce utopie. La douceur de ta vie. Un scorpion doit frapper à la porte du château, occuper déjà les quelques gardes qui s'occupent de l'entrée. Escalader les côtés par les fenêtres - atteindre ainsi celle qui est demeurée entrouverte, la seule, dans l'étage le plus élevé. ▬ Elya, c'est ton tour. Dès qu'elle sera parvenue sur le seuil de l'entrée principale, jeune fille pleurant sa perte, l'absence de ses parents (gamine étonnante, au demeurant), vous pourrez commencer l'escalade. C'est parti pour la grande escapade.
◭ Asmodee
seconde des scorpions« Marche doucement car tu marches sur mes rêves. »
▬ L'ENVOL : le chat qui les observe, la main froide et vengeresse, l'élan sans chuintement. le rire qui se répercute dans le regard. la liberté qui commencera toujours par la discipline. ▬ LES PARCHEMINS : 195 ▬ L'AME : doomsday ▬ LE REGARD : Rooney Mara ▬ LE TEMPS : 34 ▬ L'ETOILE : là, sur la voûte, cet équilibre apparaît plus ténu qu'il ne l'a jamais été. les certitudes sont en train de tomber. Le masque aussi. ▬ LE SANG : il fut un temps gwelnaur. aujourd'hui heledir. ▬ LE FEU : d'aucuns diraient qu'il faut aimer. ils vous disent cela car ils portent leurs cœurs en bandoulière et s'étonnent de voir leurs cœurs piétinés. Jamais. ▬ LE PACTE : Le Scorpion. ▬ LES ROSES : 3814
« Alors que vous l'aurez délivré de tous ses automatismes et rendu à sa véritable liberté. Alors vous lui réapprendrez à danser à l'envers comme dans le délire des bals musettes. Et cet envers sera son véritable endroit. » POUR EN FINIR AVEC LE JUGEMENT DE DIEU - antonin artaud.
« Non. - Comment ça non, Asmo ? - Je ne veux plus y aller. »
Il lève les yeux vers toi, toi, cette femme en qui il repose toute sa confiance. Cela fait des semaines que vous préparez tout ça. Et dans son sourire, tu sais qu'il ne te ne croit pas. Il se veut fugace, ces derniers temps, et tu doutes. Si fort. De tout. Parce que quelque chose est en train d'arriver. Mais tu ne veux pas écouter les signes. On ne t'a jamais appris. Tu connais les humains. Sais les observer sans qu'aucun détail ne t'échappe. Tu envies la lune et te soumet à elle. Mais tu frissonnes sous l'armure.
« Il va se passer quelque chose, Arthur. Je le sais. Je le sens »
Ça y est. Il a compris. Et il ne le permet pas. Que les plus jeunes doutent c'est un fait. Mais pas toi. Pas toi.. Alors il s'approche, tu le suis du regard, le maintient. Jamais ne le cherche. Cela fait bien longtemps que tu ne le cherches plus. Tu l'as trouvé il y a des années. Et ne l'as plus lâché.
« Où le sens tu, Asmo ? »
Il appose une main sur ton cœur, puis une autre sur ton ventre. Avec la paume. Le silence se fait, tu ajustes ta respiration à la sienne. Il ne te quitte pas du regard. Au bout de ce qui semble des minutes interminables tu lui désignes ta main droite. Celle posée sur ton cœur.
« Alors nous irons. », conclut t-il dans un sourire immense.
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Tu sens sa tension. Tu peux la sentir alors que tu fixes Mistral dans les yeux et lui donne ses instructions. La nuit vous accompagne bien plus loin que vous n'avez jamais rêvé ce soir. Ce soir oui. Un des plus grands coups de la guilde. En témoignent ces petits oisillons qui veulent bien faire et le font sans hésitation. Ça ne s'est jamais vu.
Un seul coup d’œil vers lui. Dans le coin de la prunelle. C'est un enfant à cet instant. Aussi excité que s'il découvrait des victuailles, lorsque son ventre gronde. Aussi effrayé que, s'il pensait que ses parents ne reviendraient jamais. Quand il te regarde ainsi, tu as cet impression qu'il pose le monde entier sur ses épaules.
« Asmo. Il faut y aller. »
Mais alors cette voix là s’élève. Et tu sais qu'il ne te ferait jamais tel affront. C'est une promesse. Un accord tacite. La famille. C'est elle qui compte. Rien de plus. Ses racines ont formé un arbre qui pourrait passer les âges.
Seul un tic nerveux agite la commissure de tes lèvres lorsque tu regardes le château qui s'élève devant vous. Et seules quelques fenêtres sont éclairées par la lueur des bougies. La cire ne rivalisera en aucun cas avec le faible éclat de la Lune. Vous ne l'avez jamais voulu docile. Vous l'avez toujours vénéré. Ce soir, elle vous remercie par son faible éclat.
Une pierre tombe dans l'eau. C'est là. Elya a atteint l'entrée. Vous distinguez Dante qui a ouvert la marche et descend de la seule meurtrière non surveillée car sujette à l'effritement et promise à des travaux prochainement.
Par conséquent condamnée. Par conséquent accessible par un homme tel que Dante.
Vous distinguez la fenêtre. C'est cela qui a été le plus dur. Mais impossible ne fait pas partie de votre vocabulaire.
Un seul coup d’œil à Arthur et tu sais. C'est l'élan. C'est l'inflexion. A cet instant, vous pourriez ne faire qu'un, cela ne surprendrait personne. Chacun de vos mouvements est ancré aux éléments, la suite évidente de l'autre. Tout se joue. La raison de votre venue. Le contraste entre l'enfant que tu as pu être et ce que ton visage laisse glisser est mince. Tu te refuses à cette idée.
« A qui la nuit fait-elle peur, Asmodee ?, demande t-il alors que le vent agite quelques mèches peu dociles. Il te regarde dans un sourire. - A ceux qui attendent le jour pour voir. »
Il y a en toi une sensation que tu as rarement connu quand tu empoignes ta première prise. Tu sais que ce coup sera réussi ou ne le sera pas. Il n'y aura pas d'entre-deux. Vous êtes allés bien trop loin, vous autres, sur le chemin de la liberté et du pied de nez pour pouvoir reculer. Ce soir ce n'est pas seulement ce qui brille au soleil dont vous comptez vous emparer. C'est aussi une dignité de plus. Que vous méritez. Que vous vous octroyez. La vie a voulu faire de vous des incapables. Et vous l'avez accueilli comme une vieille amie. Et vous lui avez proposé le thé. Vous aviez un coup d'avance sur elle.
Au loin, tu entends l'hennissement du cheval. Dans le coin de l’œil, tu vois quelque chose de rouge. Et le sait ardent.
« Ne te laisse pas distraire, Asmo. Cela faisait partie du plan. », murmure Arthur, juste derrière toi.
Il a toujours été derrière toi lorsque vous escaladiez. Il a dit que si tu tombais, il pourrait te rattraper. Tu ne l'as pas cru. Tu ne le crois toujours pas. Si tu décides un jour de tomber, il ne te rattrapera pas. Il l'a déjà fait. On ne tolère pas la deuxième chance ici bas. Et surtout pas pour toi. Cette fois ci, c'est toi qui ne le laisserait pas faire. Ce n'est pas une question de confiance. C'est une question de loyautés.
La prise est facile. Un léger soupir semble étreindre ta clavicule et tu sais que c'est lui. Il y a quelques mois, un incident lui a valu une côte blessée. Il s'est maudit de sa faiblesse. Vous l'avez tous vu comme une force. Mais Arthur ne veut pas frissonner sous le masque. Alors que toi tu frissonnes sous l'armure. C'est cela votre fossé, votre ennemi intime. C'est cela qui va finir par se casser. Sur les pavés. Un moment où un autre.
Vous y êtes presque. Il n'en a jamais douté, alors qu'il pose sa main sur une aspérité proche de la tienne. Le souffle se fait plus profond, plus concentré.
« Arthur. »
Alors qu'il se tient sur ce mur comme s'il était vulgairement posé à l'horizontal, il tourne son visage vers toi. Il y a cette même entièreté. Ce même abyme de la première fois. Qui ne t'a jamais quitté. Vos muscles sont bandés, l'instant est crucial, mais il sait.
« Asmodee. » - Imagine. Si tu étais le jour. Que ferais tu ? »
Il marque un temps d'arrêt. Vous savez que Dante est passé par la fenêtre bien avant que vous n'arrivez. Ce n'est qu'un chuintement. Il n'aime pas cela. Et c'est palpable. Tu abordes un terrain sur lequel il ne veut pas marcher. L'air y sent étrange. La terre y est bien trop fertile pour que cela n'apparaisse pas suspect. Là, suspendu à des centaines de mètres au dessus du vide, quelque chose a été outrepassé. Mais cela fait bien longtemps que c'est le cas.
N'est-ce pas ?
« Je serai fort pour ceux qui se donnent à moi. Je révélerais ceux qui se cachent. »
A cette phrase, tu déploies ton bras dans le vide. Tu n'as que pour prise la fenêtre par lequel vous devez entrer. Dans les fourmillements de ton corps proche de l'allégresse, tu t'empreints de ces mots.
Lorsque tu pénètres dans la pièce, l'acrobate un grand sourire. IL sait que c'est maintenant; et le Roi fait de Ténèbres n'a qu'a bien se tenir.
« Allons y. »
◭ Arthur
CHEF SCORPION. « Limites sans cesse repoussées. Plaisir infini. »
▬ L'ENVOL : le silence et la nuit, l'aigle qui déplie ses ailes, chaparde aux grands de ce monde, voleur hécatombe. ▬ LES PARCHEMINS : 239 ▬ L'AME : savage, cyrielle. ▬ LE REGARD : b. cumberbatch. ▬ LE TEMPS : la quarantaine bien tassée, le fil des années. ▬ L'ETOILE : libre. vagabondant. ▬ LE SANG : nulle allégeance n'a ton coeur - qui suit l'or sonnant et trébuchant. ▬ LE FEU : vagabondes d'un soir. ▬ LE DESTIN : marchant itinéraire et tes étals sur lesquels brillent les gemmes au soleil. officieusement, voleur, chef d'une guilde de scorpions. ▬ LE PACTE : le scorpion, poison dans ses veines. ▬ LES ROSES : 3909
Mistral lui aussi sait ce qu'il a à faire. Tout le monde est au point, tout le monde t'a longuement écouté pendant les semaines passées, lorsque vous fomentiez les coups qui sont les vôtres dans les égouts de Belithrael, à la lumière de bougies vacillantes vous transformant en ombres étincelantes. Tu te rappelles l'annonce de ce casse exceptionnel, les regards éberlués de ceux qui te suivront envers et contre tout, jusqu'à voler la lune s'il le fallait, si de ta voix suave, tu le leur demandais. Cette famille régie par ce contrat tacite de la confiance, cette famille que pas à pas tu as construit de tes doigts, assemblant les matériaux les plus divers pour une construction d'envergure. Véritable pygmalion sous couverture.
Et le fameux jour est arrivé. Te voilà, dans cette forêt, à l’orée même de ta vie, le regard éperdu devant la grande maisonnée qui vous fait face, celle-là même qui recèle nombre de secrets, nombre de mystères, que tu t'apprêtes à faire tien, dont tu seras - bientôt - le gardien. Nul ne doit néanmoins te faire défaut, dans cette entreprise, et chacun doit bien poursuivre son rôle, celui qui lui est échu lors des différentes réunions. Tu leur fais une confiance aveugle, mais demeures inquiet devant la multiplicité des possibles. Un accident est si vite arrivé, si vite advenu, capable de foutre en l'air des semaines de préparation, de discutions. Il suffit parfois d'un oiseau vacillant au mauvais moment, d'une chandelle qui s'éteint sous un souffle du vent, et c'est la fin. La terrible, la cruelle, la délicate fin qui peut aller jusqu'à signer votre arrêt de mort, votre billet tout droit offert jusqu'aux sillages de Kendassa, là où plus jamais la lune ne se lève, ni ne se couche.
Allez, il est l'heure. Vos muscles se bandent, pour franchir le mur d'escalade qui vous attend. Une pacotille pour toi, qui de longues années, d'incroyables nuits ont forgé une capacité d'ascension sans pareille. Ces frissons, ces vibrations dans chacun des muscles que tu arquent, dans chacune des prises que tu enserres de ta main certaine et sûre, ces émotions divergentes qui font cœur en ton âme, symphonie délectable. Tu t'offres le luxe de t'arrêter un instant, de te tourner vers ton ombre, vers ta nuit, vers Asmodee. ▬ A qui la nuit fait-elle peur, Asmodee ? Tu souris. Cela t'amuse, et à cet instant précis, tu crois ne jamais t'être senti aussi vivant. ▬ A ceux qui attendent le jour pour voir. Elle est si belle, elle est si forte, ces réponses sont parfois plus improbables même que tes questions énigmatiques, mais toujours, elles font naître en ton visage ce sourire sympathique. Tu l'accueilles en ton cœur, Asmodee, tu l'accueilles en ton âme, et elle et toi ne formez plus qu'une seule muraille, de celles, inébranlables, que nul coup du sort ne peut faire rompre.
Le hennissement d'un cheval l'étonne, la fait changer de regard, de direction, la met, instinctivement, en danger. L'on ne réagit nullement de la même manière lorsqu'on escalade des étages mortels que lorsqu'on garde pied sur la terre ferme, vous en conviendrez. Cela ne t'amuse qu'un instant, lorsque tu songes un court moment aux risques qu'elle prend. Tu ne pourrais la perdre, Arthur. Cette simple certitude fait vriller tes convictions. La glace, le calme olympien que sont tiens ne résisteront guère à sa perte, et cela t'effraie. C'est bien la première fois qu'un élément étranger implique ainsi ton esprit. ▬ Ne te laisse pas distraire, Asmo. Cela faisait partie du plan. Un murmure. Tu demeures derrière elle, comme pour la protéger, comme si elle avait encore besoin de toi pour l'aider. Tu y songes, là encore. S'il advenait un problème - terrible accident, potentiel mortel - au cours de l'une de vos missions, pourrais-tu la laisser tomber pour sauver tous les autres ? Serais-tu capable de la laisser sombrer, pour le bien du plus grand nombre. Quelques secondes, aussi discret que l'aigle lorsqu'il fond sur sa proie, tu t'ébroues, désireux de reprendre tes esprits. Cela fait quelques jours que la question te taraude, mais ce n'est pas le moment de la laisser te perturber. Bien d'autres priorités règlent ton agenda. A moins de souhaiter rejoindre Kendassa.
▬ Arthur. Cette voix, douce, suave et lascive qui t'appelle, cette voix qui t'émerveille. Un frisson parcourt ton corps entier, que tu préfères mettre sur le compte de l'escalade qui, bientôt prendra fin, de tes muscles qui se bandent comme s'ils étaient nés pour ça, de cette facilité qui demeure pour toi à marcher dans le vide, à surplomber la nuit, à rejoindre la dame Lune qui, là-haut, tout là-haut, vous appelle de ses rayons majestueux. ▬ Imagine. Si tu étais le jour. Que ferais tu ? Ne jamais réfléchir lorsque ces questions se posent d'elles-mêmes, lorsqu'elles atteignent cet espace indéfinissable au fond de ton âme où la raison n'a pas sa place. Seule la poésie qui, instantanée, immédiate, franchit le seuil de tes lèvres pour délivrer la réponse, la réponse qui en toi est ancrée. ▬ Je serai fort pour ceux qui se donnent à moi. Je révélerais ceux qui se cachent.
L'escalade a pris fin, l'acrobate est dans la pièce. Tu connais déjà le lieu secret où les bijoux sont cachées. Ce ne sont pas n'importe quels bijoux. Ce n'est pas n'importe quel château. Et tu ne délivres pas - pour l'instant - les trésors enfouis là-haut. Oh combien tu aimes les mystères et leur saveur douce-amère. Le couloir est long et longiligne. A ta gauche, dans la chambre, la jeune fille du couple dort d'un sommeil profond, sans nuage. Un sommeil quelque peu provoqué par le poison que tu as fait insérer par la bonne en milieu de journée. Nul risque qu'elle ne s'éveille, à l'entente de vos merveilles. Là, à droite, un lieu de bain, vide, terne, sans grand intérêt. Non, les trésors se nichent là où il est le plus difficile de les atteindre. Dans la chambre du couple, dans l'antre de l'amour de ces deux nobles gwelnauriens, de l'homme au sabre noyé dans le sang carmin de ses ennemis, de la femme à l'attribut féminin dévoré par le désir libidineux de son sombre époux, à la vie ruinée, et aux espoirs inachevés. Le tableau. Le tableau est un faux, et derrière lui se cachent les trésors, les trésors d'Astalith. Ceux que si ardemment tu convoites. ▬ Asmodee. Que tu murmures alors que vous êtes encore dans le couloir, alors que là-bas, au bout du corridor, se trouve la chambre dans laquelle les risques sont si grands. Car l'homme au sabre affûté ne dort jamais que d'une oreille, et le poison en grande quantité aurait bien trop risqué de le tuer. Il a fallu choisir. Il a fallu décider de la priorité, et la mort n'a jamais été ton choix premier.
La jeune fille occupe toujours les gardes du premier, l'étage est désert, l'acrobate vous a permis d'entrer. Il est temps, il est l'heure. Il est le moment des risques les plus grands, car Mistral aurait la force de le maîtriser, mais pas le silence que tu as, toi. C'est à toi, d'y aller. A toi, et Asmodee. ▬ Es-tu prête ? As-tu confiance en la nuit, pour nous offrir son concours ? Crois-tu en elle ? Tu as besoin d'être rassuré. Et, comme à ton habitude, comme toujours dans ces précieux instants de vie, tu le caches habilement derrière la poésie éternelle. Et le langage de ton âme, que tu livres assidûment.
◭ Asmodee
seconde des scorpions« Marche doucement car tu marches sur mes rêves. »
▬ L'ENVOL : le chat qui les observe, la main froide et vengeresse, l'élan sans chuintement. le rire qui se répercute dans le regard. la liberté qui commencera toujours par la discipline. ▬ LES PARCHEMINS : 195 ▬ L'AME : doomsday ▬ LE REGARD : Rooney Mara ▬ LE TEMPS : 34 ▬ L'ETOILE : là, sur la voûte, cet équilibre apparaît plus ténu qu'il ne l'a jamais été. les certitudes sont en train de tomber. Le masque aussi. ▬ LE SANG : il fut un temps gwelnaur. aujourd'hui heledir. ▬ LE FEU : d'aucuns diraient qu'il faut aimer. ils vous disent cela car ils portent leurs cœurs en bandoulière et s'étonnent de voir leurs cœurs piétinés. Jamais. ▬ LE PACTE : Le Scorpion. ▬ LES ROSES : 3814
Tu ne connais que trop bien à quel point la mémoire est perfide. Tu sais qu'elle ne doit jamais entacher tes pas. Car tes pas de Scorpion sont faits pour être ancrés dans le présent. Dans ce présent que vous vous évertuez à embellir, rendre fou, rendre palpable. Tu ouvres la marche alors que Dante disparaît au loin. Maintenant c'est toi et lui. Lui et toi. Contre le reste du monde. Tu ne peux ignorer cette boule d'excitation au creux de tes reins, ton starter. Ton moteur lui est derrière.
« Asmodee. »
Sa voix est un chuintement à peine palpable lorsque vous pénétrez dans le corridor aux pierres tremblantes. Là bas, la promesse d'un ailleurs. Le plus gros risque que vous ayez pris jusque là.
« Es-tu prête ? As-tu confiance en la nuit pour nous offrir son concours ? Crois tu en elle ? »
Tu t'arrêtes pour de bon cette fois ci. Tes gants se plient et se déplient, les rares bougies du corridor éclairent son visage d'albâtre quand tu te retournes. Par Astalith que cet humain peut dégager une aura magnifique, parfois. Dans son inquiétude, dans sa peur. Dans ce regard effronté, indécent, inquiet, complet, vivant. Et à l'intérieur de tes prunelles luit ce qui t'a toujours consumé et qui n'arrêtera pas son travail tant qu'il n'aura pas terminé. Tu le laisses faire. Plonger au plus profond de ton abyme personnel. En revenir. Plus fort encore. Cette détermination qui fait de vous légion, tu la sens couler dans tes veines. Tu sais qu'une erreur a été commise. Mais cela, il ne le verra pas. Il est bien trop tard pour reculer. Trop tard pour réfléchir à ce que si passerait si...
« Je crois en nous. Et nous sommes indissociables de la Reine sombre, très cher. »
Un sourire vient étirer ses lèvres fines et tu le rejoins. Lorsqu'il pose ses yeux là, lorsque vous ne pouvez comptez que l'un sur l'autre, on dirait que le monde tremble. Tu te retournes et continues ton avancée dans le corridor. Vous ne faites pas plus de bruit que les grains de sable dans le désert.
Lorsque tu l'as rencontré, que tout a commencé, tu t'es demandé comment tu avais pu passer ta vie sans cette adrénaline. Telle l'Homme à la première de la chair, tu t'es délecté de chacun de vos coups, chacun de tes pas dans ces endroits où d'aucun n'aurait pensé, osé, pénétrer. Ce qui fait votre force c'est ce que vous cherchez à surpasser. Vous mêmes. Et en ce sens, vous n'aurez aucune limite.
Ça y est. La voilà. N'importe quel idiot se serait heurté à toi face à ton arrêt brutal. Pas lui. Il a senti ton impulsion avant qu'elle n'arrive. La porte semble vous narguer ainsi. Fière de sa carcasse puissante d'hêtre. Arthur ouvre le sac à dos de cuir et te tend le fil de fer et la pince. Tu as toujours aimé crocheter des serrures. Cela requiert une parfaite écoute, une observation qui dépasse le visible. Cette fois ci c'est si facile que s'en est déroutant.
Tout était trop facile, Asmodee. Elle doit se taire, cette voix. C'est nécessaire.
Tu ouvres la porte dans un silence quasiment absolu. Même cela n'avait pas été laissé au hasard. A l'instar de vos actes. Cette chambre est immense. Tout transpire le faste. Tout te donne un goût ferreux dans la bouche. Tu voudrais brûler ce qui t'entoure. Tu te tournes vers eux. Les tissus du lit à baldaquin sont attachés, se faisant tu peux voir tout le décorum. Elle est belle. De longues boucles brunes entourent un visage long au nez camus. Elle est recroquevillée dans un coin du lit conjugal. Sa position à lui t'intrigue un instant. Il dort assis. Son épée contre le mur, à sa gauche. . Ses sourcils sont froncés. Le visage porte les traces d'une vie à arracher celle des autres. Il n'est pas en paix. Il est trop tard pour qu'il le soit.
A droite de la pièce, sur le mur qui fait face aux époux, il est là. Le tableau tant convoité. Tu ne peux pas réprimer un frisson. Ce que vous faites ce soir, c'est du génie. C'est de la folie. C'est une hérésie pour les bonnes gens. C'est magnifique. C'est aussi une quête, un hommage. Les bijoux d'Astalith. Tu sens le regard d'Arthur sur toi et te retourne. Si vous pouviez vous éclateriez de rire. Comme ces bambins qui sautent dans les flaques.
Mais ceci n'est pas une flaque. Et vous avez cessé d'être des enfants depuis bien longtemps.
La toile représente un loup aux crocs acérés. Personnification du Dieu de pouvoir qui, lassé de ne pas trouver grâce aux yeux d'Astalith commit l'irréparable.
Arthur s'avance, le pas léger, il te semble, aussi, le cœur si lourd. Ce qu'il accomplit avec toi, ce soir, c'est aussi pour se prouver quelque chose de bien plus fort. Tu le sens, ça palpite, c'est électrique. Il n'a aucun mal à comprendre le système qui se cache derrière pour obtenir ce qu'il veut. Le tableau pivote et laisse apparaître une porte dans un renfoncement. C'est à l'intérieur que se trouve ce que vous convoitez. C'est un système de serrure à engrenage. Il a toujours aimé les casses-tête, tu pouvais le voir s'évertuer des heures devant. Sans jamais relâcher, sans jamais perdre patience. Il ouvre la porte mais tu sens pointer quelque chose.
Derechef, tu te tournes vers le noble. Il a les yeux grands ouverts et vous fixe. En prenant compte du fait que son épée n'est pas à portée de main, que son cerveau ne semble pas avoir encore émergé et que tu trouves à exactement douze mètres de son lit, tu disposes d'exactement quatre secondes pour arriver jusqu'à lui.
Tu en mets trois. Une de plus à apposer ta dague sur sa carotide. Tu sais qu'Arthur a arrêté son geste. Et qu'il vous tourne le dos. Tu le sens parce que c'est inscrit dans l'air. L'air parle. Empreint de glyphes que vous avez appris à déchiffrer avec le temps. Ce que l'homme voit c'est une femme au visage couvert d'une peinture noire qui le tient en joue. L'homme ne montre pas signe de peur.
Il ne dit rien, tu sais qu'il t'intime de ne pas faire ce que t'apprêtes à faire. L'épouse est toujours dans la même position, la respiration lente et profonde. Tu apposes un index sur tes lèvres et l'intime à se lever en silence. Tes yeux ne souffrent d'aucun clignement. Une seule erreur et elle peut t'être fatal. Doucement, il se lève. Tu crois maîtriser la situation, quelque chose te hurle que ce n'est pas le cas.
Il est vêtu d'une chemise en flanelle et d'un pantalon de cuir. Surprenant. Comme si cet homme était paré à toute éventualité. Qui se rhabille après l'amour.
Tu pivotes si vite. Et avance, la lame maintient l'homme et lui indique la direction. Tu peux sentir son corps tout contre toi à mesure que vous avancez vers Arthur. Et ce corps est fort. Et ce corps te révulse. La seule personne avec qui tu as laissé autant de proximité s'installer c'est celui qui pivote et vous fixe. Insondable. Il semble mort à cet instant.
C'est arrivé à sa hauteur que quelque chose te frappe. Et tu te maudis de ne pas l'avoir senti plus tôt. Tu t'es simplement décalé de quelques millimètres. Et tu as senti. Ce qui est déjà dans sa main et est venu se planter dans ta cuisse. Tu étouffes un glapissement de douleur. Pourtant, tu n'as pas besoin de te retenir de le lâcher. Il est déjà tombé. Inconscient. Encore de ce monde. Arthur connait ce genre de manœuvres. Certains points chez nous sont si vulnérables.
Comment est ce que tu n'as pu penser à cela. Tu lèves le visage au plafond. Serre les dents. Arrache ce petit couteau, pas plus épais que ceux dont on se sert pour manger. Lorsque l'émeraude vient rencontrer l'acier tu manques de reculer.
Tu ne lui as jamais connu un regard comme ça. Il est empreint d'une furie sans nom. Et cette furie n'est pas dirigé contre toi. Il n'est pas un assassin. Ces yeux là, pourtant. Tout dans ces yeux prouvent le contraire. Et tu le sais. Parce qu'ils sont ton propre miroir. Celui auquel tu fais face tous les jours. Que tu as fui si longtemps.
La douleur est diffuse mais l'homme affalé à terre est un guerrier. Ce n'est pas un mercenaire. Il n'est, de surcroît plus tout jeune. Et cela t'a sauvé la vie.
Il est pétrifié. Tu as peur. Une peur qui t'est inconnue. Alors tu claudiques en deux pas vers lui et prend sa main. La pose sur la blessure encore chaude. Lui fait sentir l'inflexion qu'elle t'apporte, à quel point elle te fait sentir vivante. Tu t'adresses à lui tout doucement, comme on voudrait bercer une étoile qui naît sans le savoir vraiment.
« Je. Vais. Bien. Je vais bien. »
Tu ne reconnais par ton propre murmure. Il ferme un instant les yeux. Inspire profondément. Tu enlèves ta main, il enlève la sienne et hoche la tête. Tu l'as perdu dans l'ombilic des limbes. Quelque part, dans sa pièce mental. Où la lune n'éclaire rien. Il faudra quelques minutes pour qu'il revienne à lui, tu le sais.
Tu lui tournes le dos, il se saisit d'un bandage dans ton sac et te le pose délicatement dans la paume de la main.
Pourquoi les Dieux nous ont ils muni de cette malédiction de reposer en ses enfants le pouvoir de se reconnaître ?
◭ Arthur
CHEF SCORPION. « Limites sans cesse repoussées. Plaisir infini. »
▬ L'ENVOL : le silence et la nuit, l'aigle qui déplie ses ailes, chaparde aux grands de ce monde, voleur hécatombe. ▬ LES PARCHEMINS : 239 ▬ L'AME : savage, cyrielle. ▬ LE REGARD : b. cumberbatch. ▬ LE TEMPS : la quarantaine bien tassée, le fil des années. ▬ L'ETOILE : libre. vagabondant. ▬ LE SANG : nulle allégeance n'a ton coeur - qui suit l'or sonnant et trébuchant. ▬ LE FEU : vagabondes d'un soir. ▬ LE DESTIN : marchant itinéraire et tes étals sur lesquels brillent les gemmes au soleil. officieusement, voleur, chef d'une guilde de scorpions. ▬ LE PACTE : le scorpion, poison dans ses veines. ▬ LES ROSES : 3909
Chaque pas est une explosion au fond de ton âme. Les frissons qui parcourent ta peau claire. Le bonheur de l'avoir à tes côtés, elle, la solaire. Car nulle mieux qu'elle ne saurait te rassurer, t'apaiser, canaliser les émois qui à cet instant parcourent ton cœur, malgré le masque d'apaisement que tu livres au monde entier. Ce masque qu'elle seule peut briser. Dans sa force, sa douceur. Dans la poésie qu'elle te livre à chaque murmure qui franchit le creux de ton oreille. Les frissons, derechef. ▬ Je crois en nous. Et nous sommes indissociables de la Reine sombre, très cher. Le sourire en réponse. Le sourire et le silence qui vous environne, vous protège du monde extérieur, ce rien qui se transforme à votre contact, devient tout, devient poésie devant le monde, devant la vie. Ce silence, ce rien que vous manipulez de vos doigts agiles et lestes, que vous métamorphosez en un tout salvateur.
Votre univers. Celui qui vous convient. Votre cape lunaire et vos bagues stellaires, vos atours célestes, dans le calme olympien de l'infini rien.
C'est à elle de crocheter la serrure de la porte qui - seule désormais, vous éloigne de vos objectifs. Cela fait des années que tu cours après les bijoux d'Astalith, depuis que tu as entendu la rumeur bruissant à ce sujet. La déesse rancunière et vengeresse, la barbarie au creux des reins, ses bijoux détenteurs du secret des siens. Deux bagues, un collier, d'une valeur inestimable, historique, délectable. Te voilà, Arthur, à l'aube d'une nouvelle ère, dans le panthéon des Dieux et ses mystères.
Et la porte s'ouvre, magique, vous entraînant dans les confins de vos possibilités. Il y a derrière cette porte la vie ou la mort. Il y a cette incroyable dualité, en laquelle tu ne crois jamais, sur laquelle tu craches abondamment. Pour toi ne réside en ce monde ni noir, ni blanc ; seul le gris, la brume qu'entraîne avec elle le cocon de la nuit, prédomine dans cet univers, prend sa place dans l'atmosphère. Pourtant, là, cette certitude qui vibre en ton cœur agité : la vie, ou la mort. La réussite, ou l'échec. Mortifère. Et le danger dans lequel tu entraînes Asmodee te rend plus lourd, c'est l'univers que tu portes sur tes épaules, à la simple idée qu'il ne lui arrive malheur, que de sa perte, tu sois le décideur. Un souffle. Une respiration. Légèrement plus longue que les autres. Et les palpitations de ton cœur s’apaisent à nouveau. Ne pas oublier que la réussite de cette mission dépend du calme légendaire que tu peux arborer à chaque instant.
Ils sont deux, précisément comme tu t'y attendais. La femme, roulée en boule, ses longs cheveux flottant sur ses épaules, te donne envie de l'emporter sur ton dos et de l'amener loin, loin de la violence de son époux immérité, loin de cette antre dans laquelle elle est violée. Elle réveille en toi une forme de justice qui hurle en ton esprit, mais toujours, ton pouls reste calme, tes gestes, parfaitement maîtrisés. Seul ton âme vagabonde entre les différents émois qui la traversent. Mais la bourrasque ne t'ébranle pas. Elle glisse. Glisse sur ta carrure, posture impeccable, sans te faire bouger d'un centimètre. Toujours, tu demeures maître en ton esprit.
Et puis l'erreur. Fatale. Mortifère. L'erreur, apportée par Kendassa directement des Enfers. L'erreur, celle que si fort tu redoutais, au creux de ton âme, la peur carmin coulant dans tes veines. Tu as vu le mouvement d'Asmodee, l'erreur, la terrible erreur commise, celle qui peut coûter des vies. Alors que tes mouvements se sont stoppés, que plus un millimètre de toi n'a plus remué, ton attention, elle, s'est focalisée. Sur elle. Sur cette dague contre la carotide, sur l'issue fatale de cette escapade, sur la peur, la terrible crainte, non, que dis-je, la terreur qui fait vibrer le palpitant d'Arthur, le tien, de palpitant, celui que t'as l'impression de voir de loin, tellement tu n'es plus maître de tes sentiments. N'est-ce pas la première fois qu'ainsi tu te désoles ? Cela n'empêche pas tes mouvements de demeurer d'une précision sans faille, cela ne t'empêche pas de lui sauver la vie dans l'immédiateté de la bataille, dans l'absolue urgence de cet instant, de ce type de moments qu'il ne faut pas rater, de ce genre d'instants qui demeurent gravés. Ton point qui touche son cou, doucement, pas plus qu'une caresse, l'issue fatale de ce geste. L'homme tombe au sol dans un craquement, un grincement. Pas bien fort, suffisamment toutefois pour que les gardes s'inquiètent, pour que les minutes, les secondes vous soient désormais comptées. La femme ne remue toujours pas, tant le poison a bien fonctionné - son sommeil durera. D'elle ne vient pas le problème.
Le regard dur, le regard froid. Assassin. Contre toi, contre l'homme désormais inanimé, contre elle, aussi. Contre l'erreur qu'elle a commise, contre l'accident que tu as permis, par ta volonté de récupérer ses bijoux volés. Le regard comme t'as jamais regardé. Elle tente de te rassurer, par le murmure qu'elle glisse en ton oreille alors qu'elle pose ta main sur sa blessure, et ces doigts que tu récupères, couverts de son sang carmin, couverts aussi de la vibration de son corps, de son âme, la pulsation de sa vie - pas encore éteinte. Tu respires, calmement. Délicatement. Le temps n'est pas venu pour les remontrances. Tu sors un bandage que tu places dans sa main. Silencieux.
▬ Partons. Le mot est sec, le mot est dur, le mot est fort. Le mot tranche l'air. La décision ne mérite pas d'être soupesée. La décision est prise. Trop grand est le danger, d'autant plus avec une voleuse blessée. Tu te poses vers elle, lui offres ton épaule sur laquelle s'appuyer. Pourra-t-elle seulement escalader ? Ton esprit envisage toutes les différences options, l'infini champs des possibilités qui, encore, vous sont ouvertes. Le hurlement d'un loup se fait entendre. Le signal. Les gardes ont été interpellés par le corps de l'homme gisant au sol, dont tu n'es pas parvenu à suffisamment amortir la chute, trop préoccupé que tu étais de l'état d'Asmodee. Échec absolu. Terreur non contenue.
Tu laisses derrière toi les bijoux d'Astalith. Des mois et des mois de préparation avortés.
Tu l'invites à marcher prestement, toujours aussi silencieusement, franchissant à nouveau le couloir dont vous venez. A peine as-tu pris le soin de remettre à sa place le tableau, tant le temps vous est compté. Ce chemin que vous venez de franchir, l'adrénaline au creux des reins, te semble désormais d'une absolue tristesse, d'une totale déchéance. L'échec vous pourchasse, aussi sûrement que le sang d'Asmodee goutte sur le sol et sème derrière vous une traînée venant marquer la terrible fatalité.
C'est reparti pour l'escalade. Et ta voix qui résonne dans le silence de la nuit. Tu ne peux plus attendre. ▬ Il est des risques que l'on ne peut courir. Elle se retourne, te regarde, pendant que vous poursuivez votre descente. Le danger n'est certes pas écarté, loin de là, mais le sol se rapproche de vous, et, avec lui, la vie sauve. Des chevaux non loin vous attendent. Vos mains vides t'exaspèrent. ▬ Tu as commis une grosse erreur Asmodee. Ton regard est dur, ton regard est froid. Tout ton corps est reproche. Tes muscles se bandent à nouveau dans l'exercice de la descente. Mayron, non loin, vous attend, mène la garde. La jeune fille est revenue, témoignage des gardes qui déjà doivent monter les étages pour s'assurer de la bonne santé de leurs maîtres. Quelques minutes. Voilà ce qu'il vous reste, avant d'enfourcher les étalons et de partir à toutes jambes. Pourtant, tu conserves ce calme olympien, et le ton de ta voix demeure certain. Calme, plat, tendre, doux ; nulle rancune, nulle rancœur dans la tonalité qui s'échappe de ta bouche en volute de fumée s'envolant dans le froid ambiant. ▬ J'en ai commis une pire encore. Murmures. ▬ J'ai eu peur pour toi. L'aveu, fatal, qui tombe comme un couperet en même temps que vos pieds touchent le sol. Sans attendre qu'elle ne puisse te répondre, tu fais volte-face, te perd dans ta cape, dans la nuit noire. Tes ordres claquent. Plus besoin d'être discret maintenant, votre présence est déjà remarquée, au vu des bruissements de voix que tu décèles dans l'antre du château. Il faut fuir. Vite. ▬ Chevaux. Un mot. Erwyn apparaît immédiatement à l'orée de la forêt, les animaux en main. Il est grand temps. Sans un regard sur Asmodee, tu enfourches le tien. Prêt à fuir, loin, très loin.
Ne pas la voir. Partir sans elle. Se noyer dans le vague espoir de l'oubli. Ne pas lui laisser l'opportunité de répondre. De te conforter. Le silence. Et la nuit. Le concours de la solitude.
Ton cheval se cabre sous le mouvement de ton pied. Hennissement qui fait sursauter la nuit. A la fenêtre, les gardes apparaissent, juste à temps pour vous voir disparaître, vous fondre dans le décor. Les jurons qui accompagnent votre fuite. Bredouille. Les jambes d'Asmodee se serrent derrière toi. Juste avant que les gardes n'apparaissent, tu as pris soin de lui tendre la main.
◭ Asmodee
seconde des scorpions« Marche doucement car tu marches sur mes rêves. »
▬ L'ENVOL : le chat qui les observe, la main froide et vengeresse, l'élan sans chuintement. le rire qui se répercute dans le regard. la liberté qui commencera toujours par la discipline. ▬ LES PARCHEMINS : 195 ▬ L'AME : doomsday ▬ LE REGARD : Rooney Mara ▬ LE TEMPS : 34 ▬ L'ETOILE : là, sur la voûte, cet équilibre apparaît plus ténu qu'il ne l'a jamais été. les certitudes sont en train de tomber. Le masque aussi. ▬ LE SANG : il fut un temps gwelnaur. aujourd'hui heledir. ▬ LE FEU : d'aucuns diraient qu'il faut aimer. ils vous disent cela car ils portent leurs cœurs en bandoulière et s'étonnent de voir leurs cœurs piétinés. Jamais. ▬ LE PACTE : Le Scorpion. ▬ LES ROSES : 3814
« Partons. », sa voix résonne, implacable. Et tu sais qu'il est trop tard.
Et tu sais que ce n'est pas juste. Tu as floué le temps. Tu as passé six années sans commettre aucune erreur digne d'intérêt. Tu crois en cet homme. Qui t'empêche, à chaque seconde de redevenir une assassin. Croit t'éloigner de ce sort funeste. Non. Tout n'est pas tout noir ou blanc. Mais la vie, vous serre par ses sombres desseins dans le but de prouver que vous êtes capables. Dignes d'elle. Tu as envie de hurler à l'instar de la bête. Comme lorsque vous avez pénétré cette pièce, et que, tout, en toi, chuchotait que ce n'était pas une bonne idée.
Vous vous êtes répété, inlassablement que vous n'étiez pas de cet acabit. Que vous étiez meilleur. Que votre valeur était proportionnelle à votre contrôle. Mais tu sais que cela est faux. Tu sais qu'à ce jeu, on ne gagne pas. Tu peux le sentir alors qu'un ricanement s'élève de ton corps, tout entier, en guise de réponse. Tu n'as jamais demandé pardon. Tu as l'impression que la nuit se moque de toi. Rit de ta faiblesse. Elle aussi, tu l'as trahis. Tu n'as jamais aimé autre promiscuité que l'homme en face de toi. Et pourtant tu détestes t'appuyer sur lui. Sentir son odeur que tu devines empreinte de l'échec. Chaque geste sonne à l'instar un glas funeste. Chacun de vos pas est un affront. Un pied de nez à votre entreprise.
Mêler des choses qui ne doivent pas être mêlées. Tu n'as pas été en mesure d'écouter les glyphes. Toi qui a donné ton corps à la nuit. Toi qui a toujours su déceler dans l'air les failles. Toi. Tu t'es fourvoyé dans des guerres que tu percevais saintes. Plus rien n'a d'importance. Il n'y aura pas de retour en arrière.
L'aurait-il permis ?
Cette monstruosité environnante que l'on nomme espoir ?
« Tu as commis une grosse erreur Asmodee. »
Cela faisait si longtemps que tu n'avais pas eu envie de hurler à t'en cramer les poumons Alors que vos pas se rapprochent du sol, tu te dis qu'il serait si simple de plonger dans l'eau à votre parallèle. Si facile. Personne ne sait, aussi bien que vous, à quel point le silence peut parfois prendre la forme d'un cancer qui se répercute sur les murs de la honte. Personne ne le sait, parce que tout le monde mutile le silence. En fait un invité gênant. Tu voudrais te terrer si fort dans ton cœur. L'entendre battre à des milliards de vos souffles. Ne faire qu'un avec toi même. Tu t'attardes un instant sur les remous de l'eau. Elle est belle ainsi. Tranquille. Débarrassée du joug des Hommes.
Le glyphe de l'air change. Et tu sens si fort sa présence à tes côtés que tu sais ce qui va suivre. Et ça sera douloureux.
« J'ai eu peur pour toi. »
Ta gorge se sert. Un couperet est tombé. Il n'a pas le droit de faire cela. De déplacer votre confiance, votre accord tacite de son socle et en faire cela. Plus rien ne sera jamais comme avant. Il te semble que lorsque vous touchez le sol, l'air s'est épaissi. Tu avances, sans but. Sans vraiment comprendre comment tes jambes sont elles encore capables de suivre la marche. Il te tourne le dos, s'imbibant de l'obscurité comme on s'imbibe d'alcool. Il ne veut pas que tu le vois ainsi. Et dans ta bouche, ce même goût ferreux. Au loin, tu entends les gardes. A quoi bon ?
Et soudain. Comme un dernier appel désespéré. Une dernière danse. Tu saisis sa main sans hésitation. Tu n'as jamais hésité quand il s'agissait de lui. Mais tu comprends l'acte perfide de tenir à quelqu'un. C'est à présent dangereux. Tu le sens. Tu es sa faiblesse.
Il est la tienne.
Le plan était de faire une halte chez Molly car les chevaux ne pourraient pas tenir jusqu'à la capitale avec le temps que vous pensiez subir. Vous vous étiez trompé. Jamais nuit ne fut plus calme. A mesure que vous pénétrez par les chemins de travers, tu ressers ta prise. Tu as peur qu'il te prenne pour une incapable. Tu n'as jamais eu si peur de perdre quelqu'un à l'exception de tes frères qui sont comme tes fils. Quelque chose s'est cassé en toi. Au rythme où vous avez commencé, vous êtes loin devant. Les gardes ne vous rattraperont pas. Il entend ton souffle saccadé. Comment ne le pourrait-il pas. Et tu maudis encore une fois ce que tu es.
« Moi aussi j'ai peur. », tu murmures à son oreille.
Et c'est comme si tu avais déclenché un ouragan. Son pied tape le flanc de l'animal et tu te dis que tu n'as jamais senti le vent siffler à tes oreilles à ce point là. Une branche vient lui taillader la pommette mais il n'en a cure. Plus vite. Toujours plus vite. Comme s'il fuyait ses propres démons, ses propres erreurs.
Oui. Toi aussi tu as eu peur. Sauf que si tu lui avais dit à temps, vous n'en seriez pas là. Et il est trop tard pour regretter. Vous pouvez vous féliciter d'être en vie ainsi que le reste de la troupe. Joyeux lurons en mal de sensations fortes. Vous avez payé cher le prix de votre affront.
Est-ce que ça valait le coup ? Tu te questionnes. Retourne cela vingt fois, trente fois. Lorsque tu as arrives à la conclusion qu'un jour, vous posséderez les bijoux d'Astalith, tu te dis que oui. Sept fois tombés, huit fois debout. Le Scorpion, lorsqu'il est acculé, se pique lui même afin de ne pas être tué de la main d'un autre ennemi. Vous ferez en sorte de ne jamais être acculé. La Montagne parvient tout de même à votre niveau.
« Arthur, il faut ralentir. Tout le monde n'arrive pas à suivre la cadence et ne connait pas l'emplacement de Molly. », hurle t-il
Sur son visage, tu sais qu'il vient de comprendre. Vous n'avez pas eu le temps. Ce soir, vous vous contenterez de maigres richesses, sans nulle autre valeur que celle donnée par les hommes vils au cœur rongé par l'avarice. Il ralentit et vous laisse continuer. C'est lui qui ouvrira la marche. Il connait l'auberge. Tout ce que veut Arthur à cet instant, tu le veux aussi. Cette sensation fugace de voler. Ne faire qu'un avec l'animal. Ce soir, tu le sais, Molly sera généreuse avec l'hydromel. Tu en auras besoin. Et lorsque tu feras couler le liquide doré dans ta gorge, c'est un peu de ton horreur que tu laisseras se perdre dans ses yeux délavés par la vie.
Vous arrivez enfin. Elle a pris le soin d'indiquer que c'était fermé. Vous mettez votre monture dans les écuries attenantes. Il te tend la main pour descendre mais tu ne t'en saisis pas. Ce n'est pas par fierté. Tu ne veux pas lui infliger cette pulsation supplémentaire. Et cette idée t'est insupportable. La lune éclaire faiblement la cour menant à l'auberge et tu as le temps d'observer les traits tendus de son visage. Vous vous arrêtez devant la petite porte menant à l'arrière de l'auberge. Le point de rendez vous. Le code secret. Tout ce que vous aviez mis en place.
En pensant revenir conquérants. Dans quelques minutes, les autres arriveront. Alors tu profites de cette absence pour accrocher son regard. C'est un supplice cette dérobée.
« Regarde moi. »
Ta voix est froide. Elle ne souffre d'aucune discussion. Tu préfères qu'il entende la colère dans son inflexion que ce qui est à l'intérieur de toi. Cette bête qui ne cesse de griffer tes entrailles depuis bien longtemps. Tapie dans l'ombre, sommeillant. Elle a toujours été là. Tu ne le savais pas ?
Réveillée par l'éventualité infime qu'il n'y ait plus d'après.
Tu le sens tout entier dans son hésitation.
Lorsqu'il pose son regard d'acier sur toi, tu résistes. Non tu ne trembleras pas. Tu tiens bon jusqu'à la prochaine vague.
« Les rêves qui se brisent ne sont que le terreau des rêves à venir, Arthur. Mais si tu doutes de moi. Encore une fois, écoute le souffle de la nuit et le murmure de ton cœur. Eux ne mentent pas. Et si tu doutes toujours, alors je n'ai plus rien à faire à tes côtés. Car je m'en remets à toi. Je suis toi. Et tu es moi. »
Ta voix n'a pas été plus forte qu'une brise. Mais la douleur contenue dans cette apostrophe semble réveiller quelque chose de nouveau en lui. Mille tempêtes semblent agiter son esprit, son regard n'est plus sur toi. Il est en toi.
Tu te détournes. Au loin, tu entends les autres arriver.
Fugace instant. Une porte chargée de plus de pouvoirs que toutes celles des Bâtisseurs réunis. Une porte que trois mots te permettraient d'emprunter. Ces trois mots qui pulsent dans chacune des fibres de ton être, jusqu'au tréfonds de ton âme. Ces trois mots qui existent en toi depuis le commencement des temps. Et tu ne le savais pas.
Trois mots. Et tu as mis si longtemps à les comprendre.
QUOTES : Pierre Bottero.
◭ Arthur
CHEF SCORPION. « Limites sans cesse repoussées. Plaisir infini. »
▬ L'ENVOL : le silence et la nuit, l'aigle qui déplie ses ailes, chaparde aux grands de ce monde, voleur hécatombe. ▬ LES PARCHEMINS : 239 ▬ L'AME : savage, cyrielle. ▬ LE REGARD : b. cumberbatch. ▬ LE TEMPS : la quarantaine bien tassée, le fil des années. ▬ L'ETOILE : libre. vagabondant. ▬ LE SANG : nulle allégeance n'a ton coeur - qui suit l'or sonnant et trébuchant. ▬ LE FEU : vagabondes d'un soir. ▬ LE DESTIN : marchant itinéraire et tes étals sur lesquels brillent les gemmes au soleil. officieusement, voleur, chef d'une guilde de scorpions. ▬ LE PACTE : le scorpion, poison dans ses veines. ▬ LES ROSES : 3909
L'échec. Le violent, le désolant. Le terrible échec. Le pion qui a pris ta dame. Et mat. La fuite par delà les vents, par delà la nuit, en son absolue compagnie, celle qui est intolérable, intolérée en ton cœur ambition, si préparé à la victoire. Cette réussite a laquelle tu t'attendais, couronnée des lauriers de la perdition, de l'échec, le violent, le désolant. Le terrible échec. Les bijoux d'Astalith qui, encore une fois, s'envolent, perdus dans la bourrasque de la nuit, dans le silence de vos ennuis, ces bijoux que tu as mis des années à retrouver, qui, dès demain, dès l'aube, auront changé de cachette, pour ne jamais se retrouver entre tes mains désireuses. Si près du but, et pourtant rarement si loin de les retrouver. A un millimètre, à une minuscule erreur, de celle que tu n'avais pas prévu, de celle que tu ne pouvais déceler, malgré le labyrinthe mental, projections des diverses possibilités. A tel point tu as failli, et si grande est la déchéance, la déception en laquelle ton cœur se noie. Ne pas avoir prévu l'indécelable, l'imprévisible, cette honte qui se niche au fond de toi, discrète, terrible, meurtrière. Pire, peut-être, que les diverses tortures qu'autrefois ton père te faisait subir, pensant grâce à cela hériter du doux amour de Legnar, le dieu fou.
Il te faut reprendre pied. Il te faut les proteger. Mayron te crie que tu vas trop vite, que ton cheval devient fou, sous les impulsions de ton talon que désormais, tu ne maîtrises plus. Oh combien ton calme olympien souffre des martèlements de ton cœur. D'un geste de la main, tu fais ralentir le cheval qui se cabre légèrement, très légèrement, pas assez pour faire tomber Asmodee, trop pour que tu t'en aperçoives. Le rythme se fait plus lent, tout cela avance plus doucement. Hormis, bien sur, les bourrasques qui agitent ton esprit, les craintes qui s'entrechoquent, vieilles ennemies. Asmodee doit les sentir, là, derrière. Ses cuisses contre trop corps, le maintien qu'elle appuie sur toi pour ne pas choir à cause de sa jambe blessée, tu tentes d'apaiser les battements de ton coeur pour qu'elle ne s'aperçoive de rien. Mais tu sais qu'il est trop tard. Tu sais, qu'au fond, elle sait aussi, qu'elle a compris les hurlements en ton âme, ceux que jamais tu n'évoques à autrui, si ce n'est à toi-même, le soir, devant ton miroir. Tu sens qu'elle t'a cerné mieux que quiconque, mieux que toi-même, peut-être, et qu'en seule concurrence, elle n'a que la lune, la douce et tendre lune et ses rayons qui caressent ta chevelure sombre de doux reflets nocturnes. " Moi aussi j'ai peur. " Sa voix qui se repasse, ressasse en ton esprit, mais qui n'apaise rien. La peur avouée, l'échec à affronter. Tu n'es pas de ces hommes là, Arthur, de ceux qui se roulent dans leur pêché, qui assument leur lâcheté. Tu n'as certes jamais peur d'avancer, de te confronter à tes difficultés, mais celle-ci. Celle-ci ne peut être dite. Ne peut être criée au secret de la nuit. Celle-ci est plus terrible que nulle autre. Perturbations dans la famille.
Molly que tu vois au loin. Peut-être un moment de répit pour ton esprit, l'accalmie. L'auberge est illuminée, pourtant elle a pris soin d'indiquer que c'était fermer. Elle a toujours été de ces aubergistes prévenantes, prévoyantes. Ce que toi-même, ce soir, tu as foiré. Un instant, tu tentes d'oublier, de cesser de te flageller. En avoir après autrui, comme après toi, ne te mènera à rien. La sagesse tente de se ressaisir de ton intériorité, avec sagacité. Mais ces instants sont fugaces. La haine, la peur, la colère prennent le pas sur le reste. Tu descends de ta monture, l'accroche d'un geste brusque, rapide, assuré. Tu tentes d'oublier qu'elle a refusé ta main pour descendre du cheval, tu tentes d'éviter ce regard qu'elle pose sur toi. Fuyant. Pitoyable. Tu te fais honte, Arthur. Où sont passés tes beaux enseignements, la morale que tu dessers, glaciale, à ceux qui daignent t'écouter ?
▬ Apprendre à marcher, c'est d'abord accepter de tomber. La porte s'ouvre. La taverne de chez Molly vous accueille. Pourtant, tu n'y entres pas immédiatement, tant tu es alpagué par la douce voix d'Asmodee, tant le silence s'efface devant la toute puissance de sa parole - libératrice. Ses mots sont forts. D'une justesse implacable. L'émotion qui t'étreint à la gorge quand tu songes à quel point elle a grandi, changé, évolué au cours de ses années. Tant tu penses à la femme qu'elle était, autrefois, cette flamme de beauté, de force vive, la vengeance au creux des reins, l'ambition des demains, la volonté de s'en tirer face aux cruels sorts du destin. Et la voilà, face à toi, cette force brute, cette amie de la lune, cette fille du vent, et elle dessert en ton âme les mots qu'il faut, réconfortants, durs aussi, éprouvants. Elle assume son erreur, reconnais son tort, s'en sert pour évoluer. Apprendre à marcher, c'est d'abord accepter de tomber. Voilà ce que toi, ce soir, t'as oublié. Profonde inspiration. Ton regard acier qui se fond dans le sien. ▬ Les rêves ne se brisent pas, Asmodee. A peine sont-ils... Coupés en plein élan, rejoins par la compagnie. Ton visage qui se masque, à nouveau, la peur qui se cache, honteuse, peureuse. De ses petits pieds bourrus, elle se faufile entre ta colère et ta déception. Trouve refuge en ton cœur.
La soirée traîne en longueur. Les choppes d'hydromel se succèdent et se ressemblent. Tu n'oses croiser le regard d'Asmodee, pourtant assise là, non loin de toi, tu n'oses à peine dire un mot. Le calme olympien, la statue de marbre, qui boit, verre après verre, sans mot dire. Tu les regardes, tous, s'amuser, profiter, oublier, surtout. Tu les vois, cette famille que tu t'es toi-même crée, que tu as façonnée de tes doigts, tu les vois rire, chanter, s'amuser, et plus rien d'autre n'importe à cet instant. Le recul sur le monde, pour mieux voir, la distance, pour s'imprégner, s'impliquer. Tous devinent ta déception, pas un n'ose t'en parler. Ils te connaissent bien. Et ils acceptent que tu te renfermes dans ton palais mental, celui-là même que tu parcours sans cesse, les soirs d'ivresse. Les heures se succèdent et se ressemblent. Tic. Tac.
La lune est haut dans le ciel, la nuit bien avancée. Tous sont partis se coucher, se préparer physiquement à la journée de demain, à la longue chevauchée qui encore vous attend. Tu sais qu'Asmodee ne dormira pas. Pas plus que toi. Cette complémentarité vous honore. Elle fait votre force. Aujourd'hui, elle causera peut-être votre perte. Encore ces foutus dés du destin, tombés ce soir du mauvais côté.
Elle semble attendre, là-bas, sur un petit banc de fortune installé à l'orée d'une minuscule forêt. A quelques mètres de l'auberge. La soirée est douce, de ces instants de féerie, froide, mais belle, lorsque l'on peut compter les étoiles en levant la tête, lorsque l'on peut les admirer tant elles brillent dans la nuit noire. Elles éclairent son visage d'une ombre majestueuse. Somptueuse. Tu t'installes à ses côtés. Silencieux, comme t'as toujours été. T'a-t-elle entendu ? Tu n'en sais rien. Elle cache, néanmoins, sa surprise. Tu sais que c'est à toi de parler, elle t'a déjà tout dit. Le silence est d'or, tu es bien placé pour le savoir. Alors, tu laisses ce silence s'installer, encore. Le laisses vous dominer. Délicatement. Il dit déjà tout. Il dit ton coeur qui pulse plus fort depuis que tu l'as retrouvée. Il dit ton âme attristée, cette déception qui longtemps encore rythmera tes pas. Il dit aussi l'enseignement que tu as tiré de cet échec, les nuits noires et sombres que tu passeras à en élucider les leçons nécessaires. Il dit ta fatigue, aussi, mais ce besoin que tu as d'être à ses côtés, de pouvoir compter sur elle. Pour toujours. A jamais. ▬ Les rêves ne se brisent pas, Asmodee. A peine sont-ils retardés. Et d'autres naissent pendant ce temps. Tu reprends, comme si rien ne s'était passé. Comme si le temps ne s'était pas allongé. Comme si cette pause n'en avait été qu'une, inutile, futile, que vous étiez restés là, l'un avec l'autre, seuls. Qu'au fond, vous n'aviez jamais quitté cet instant.
▬ Ecoute le murmure de mon cœur. Tu prends sa main, délicatement. La pose contre ton cœur, pour qu'elle y sente la moindre vibration, la moindre pulsation. Elle saura aussi bien dire que toi ce qu'elle y voit, ce qu'on y lit. Il est livre ouvert pour elle, et elle saura y discerner toute la poésie la plus élémentaire. Elle saura y voir, y comprendre les rimes. Mieux que quiconque. Mieux que la nuit. Continuant à serrer sa main contre ta poitrine, tu déposes un baiser sur ses lèvres. Tes yeux aciers qui, de nouveau, la rencontrent. La pénètrent. ▬ Qu'entends-tu ?
◭ Asmodee
seconde des scorpions« Marche doucement car tu marches sur mes rêves. »
▬ L'ENVOL : le chat qui les observe, la main froide et vengeresse, l'élan sans chuintement. le rire qui se répercute dans le regard. la liberté qui commencera toujours par la discipline. ▬ LES PARCHEMINS : 195 ▬ L'AME : doomsday ▬ LE REGARD : Rooney Mara ▬ LE TEMPS : 34 ▬ L'ETOILE : là, sur la voûte, cet équilibre apparaît plus ténu qu'il ne l'a jamais été. les certitudes sont en train de tomber. Le masque aussi. ▬ LE SANG : il fut un temps gwelnaur. aujourd'hui heledir. ▬ LE FEU : d'aucuns diraient qu'il faut aimer. ils vous disent cela car ils portent leurs cœurs en bandoulière et s'étonnent de voir leurs cœurs piétinés. Jamais. ▬ LE PACTE : Le Scorpion. ▬ LES ROSES : 3814
Est-ce toujours ainsi que les Hommes pleurent lorsqu'ils ont perdu la guerre ? Tu te résignes à te dire que oui. Molly t'appelle, elle seule sait te parler lorsque tu es en proie au doute. Elle te traîne alors que la troupe descend un énième verre d'hydromel. Toi aussi tu as bu. Tu n'en ressors qu'un gouffre immense au creux de ton estomac.
« Tiens. Cela va te faire du bien. »
Elle te tend un verre, breuvage de plantes dont tu n'as jamais su le secret mais qui a toujours eu sur toi un effet apaisant. Tu le prends, sans hésitation. Cela ne calmera pas l'air qui s'est épaissi. Tu détestes cette emprise, ce sentiment cuisant de honte. Mais tu as tout dit. Tu le sais. La vie est un chemin qui se parcourt dans un seul sens. La reprendre à zéro est impossible. On peut choisir sa destination, réfléchir quand on arrive à une intersection, ralentir, accélérer, décider de ne plus refaire les mêmes erreurs, on ne revient jamais en arrière.
Et faisant dévier tes chemins, il a fait de toi un être entier.
« Donne moi ta main, Asmodee. », elle te regarde, de ses iris au noir si profond que tu ne distingues plus la pupille. En elle, il n'a jamais raisonné autre chose que la bonté. L'implacable justice que nous servent les vivants. Puisque les morts attendent simplement que nous comprenions ce qu'ils ont embrassé. Pour être en paix. Enfin.
Elle qui a tant foulé la terre, la devinant rougie du sang de vos aieuls. Elle qui sait le pouvoir d'un corps battant à l'unisson avec le sien. Qui connait le parjure. Qui t'a vu le sang sur les mains. L'a accepté. Lorsqu'elle saisit ta main, le temps s'arrête. Tu n'entends plus le vrombissement de tes comparses. Tu ne sens plus la douleur à ta cuisse. Elle a toujours eu ce pouvoir là, Molly.
« Concentre toi, ma fille. Reviens à l'origine. »
Ils sont là, au dehors, au dedans. Ballet incessant de scorpions oubliant. D'aucun ne sait ce qui t'habite. Cette ferveur indiscible. Tu aimes leur symphonie. Tu te concentres sur le froid de sa main. Les pulsations sur ton poignet.
« Qu'est ce que tu entends, Asmodee ? », te chuchote t-elle.
Il y a la voix fluette de l'acrobate. Il y a le chuintement du tissu de la Montagne contre la table. Le son du liquide qui descend dans la gorge d'Erwyn, celui martelé de la bague d'Elya alors qu'elle déploie sa gorge pour rire. Tu ne fais plus qu'un avec les éléments. Là. Ici. Il y a un silence. Il n'y a que le silence. C'est ça. Tu y es. Une respiration ample. Douce. Semblable au tissu que tu caresses sur les étals, au dehors. Au dehors, le hennissement, le rapace nocturne. Non. Ce n'est pas ça. Concentre toi. Tu y es presque. Oui. Le souffle est long. Mesuré. En harmonie avec le tien.
« Reviens. »
Tu la fixes soudainement. Comme si tu avais à faire avec une inconnue. Elle te sourit. Tu es prête. Lorsque vous rejoignez les autres, ton sourire est grand. Plus grand qu'il ne l'a jamais été.
Tu es prête. Peut être son courroux ne sera pas à cette hauteur là. Peut être ne sera t-il pas.
Ils ne semblent pas remarquer cette énergie nouvelle, tu aimes leur respect, tu penses à tes frères. Chéris ce que tu as laissé. Parce que le pouvoir de ce que l'on laisse est parfois plus grand que ce qui nous reste. Leste, leste. Le poids des mesures. Leste, leste, vos gorges déployées à l'appel.
Un à un, ils partent, rejoindre les draps que Molly a pris soin de préparer. Douce Molly aux effluves d'agrumes. Toi, tu pars rejoindre la nuit. Elle qui t'est si salvatrice. Tu sais que tu ne dormiras pas ce soir. Tu as beaucoup à penser. A accepter, encore et toujours. La lune est beaucoup plus haute à présent. Tu l'aperçois au loin, ce banc de fortune sur lequel tu t'asseyais. Astalith t'y attendait, parfois à la fin de ta journée de labeur. Elle aimait te soutenir. Cette fois ci, tu ne rejettes pas le souvenir. Tu le prends tout entier. L'accueille. Le berce.
Les minutes s'écoulent, entières, données comme un cadeau. Vous êtes en vie. Vous êtes ici. L'air change. C'est si subtil que tu pourrais en sourire. Tu le laisses se délier. Tu le laisses faire, car en ce monde il n'est rien de plus précieux que ce qui tournoie pour trouver une place.
« Les rêves ne se brisent pas, Asmodee. A peine sont-ils retardés. Et d'autres naissent pendant ce temps. »
Lorsque ta main trouve le repère de ce qu'il a toujours voulu éteindre, tu ne le regardes pas tout de suite. C'est un cadeau. L'un des plus précieux. Aussi fort que le premier cri qu'ont poussé tes aimés. La rivière coule non-loin. Celle qui se jette dans de plus grands desseins. Derrière vous, l'eau murmure des promesses aux cailloux qu'elle caresse tandis que la lune tente de la séduire en la teintant d'argent.
Lorsque ses lèvres se posent sur toi, tu ne comprends pas tout de suite. Mais c'est une évidence. Est-ce que tu as toujours voulu, petite fille aux yeux bouteille, t'ancrer, quelque part, là, où le soleil s'ankylose pour se faire voir ?
Et ses yeux. Ils s'en remettent à toi. Ils n'ont jamais cessé de le faire. Voudrais-tu te laisser choir ? Pour une fois. Une seule fois, bon sang.
« Qu'entends-tu ? »
Tes lèvres se déploient. Infini combat que tes lèvres. Sens tu l'impulsion de vos êtres ? Ce vif commun qui se cherche, se trouve ? Te dit que tu n'as jamais entendu cela. Ni dans les limbes, ni dans la terre, ni dans les flammes.
Reviens à l'origine, ma fille.
Tes yeux refusent de se fermer. Tu soutiens son regard. Parce qu'il n'a jamais été question que de ça. Là. Tapi. Dans le fond de vos armures, celles dans lesquelles vous frissonnez, tu ne te dérobes plus. Tu l'as trop fait déjà.
« Il croyait que la terre était grise. Mais elle est pleine de couleurs. Et il a si peur. »
Ton regard est perdu. A l'écoute entière.
« Il te demande pourquoi tu ne fais plus briller ta propre lumière. »
Tu maintiens sa main contre la sienne. Te rapproche, il se retourne, vous vous faites face, à califourchon sur ce banc aux odeurs de lierre. Il maintient son regard. Il attend. Avant toi, le déluge. Il attend que tu acceptes ce que tu as compris. Un souffle. Une inspiration. Une poussière.
Tu prends sa main, l'appose sur ta poitrine. Ta lèvre tremble. C'est Molly. Les bijoux. L'alcool. Son regard. Il détient des réponses aux questions que tu ne t'es jamais posé.
Ce n'est pas le monde qui tremble. C'est toi, toute entière. Telle que tu n'aurais jamais pu le supposer.
« Et il dit que c'est cela. L’Élan infini. »
QUOTES : Pierre Bottero.
◭ Arthur
CHEF SCORPION. « Limites sans cesse repoussées. Plaisir infini. »
▬ L'ENVOL : le silence et la nuit, l'aigle qui déplie ses ailes, chaparde aux grands de ce monde, voleur hécatombe. ▬ LES PARCHEMINS : 239 ▬ L'AME : savage, cyrielle. ▬ LE REGARD : b. cumberbatch. ▬ LE TEMPS : la quarantaine bien tassée, le fil des années. ▬ L'ETOILE : libre. vagabondant. ▬ LE SANG : nulle allégeance n'a ton coeur - qui suit l'or sonnant et trébuchant. ▬ LE FEU : vagabondes d'un soir. ▬ LE DESTIN : marchant itinéraire et tes étals sur lesquels brillent les gemmes au soleil. officieusement, voleur, chef d'une guilde de scorpions. ▬ LE PACTE : le scorpion, poison dans ses veines. ▬ LES ROSES : 3909
Tes lèvres contre les siennes. L'aveu affiché de cet échec, malmené. Tomber au sol, pour mieux se relever. Tenter de donner une amorce de contrôle à ce qui échappe à ta vérité.
Tes lèvres contre les siennes. L'aveu consommé. Le délectable émoi de cette émotion indescriptible, plus forte encore que l'allégeance que tu voues à la lune, aux étoiles, à la nuit. Tes lèvres contre les siennes. Le tourbillon incomparable, intenable, ce tourbillon qui fait vibrer ton esprit, ton corps et ton âme en une valse endiablée, de celle que tu ne peux décemment contrôler, ni même analyser. Ton cœur qui s'emballe sous sa main, aveu de la faiblesse qui désormais t'enserre tout entier, aujourd'hui, comme demain. La dure acceptation de la réalité, de votre vérité. De celle que jusqu'alors vous vous êtes cachés, mensonges éhontés crachés à la figure de la nuit étoilée. Vous rétablissez l'équilibre de vos bouches qui se rencontrent, de vos lèvres qui se connectent aussi sûrement que vos pas dans l'obscurité, l'éclat de votre duo, l'assurance de votre ressemblance. Elle est toi. Tu es elle. Aussi sûrement que tu trembles devant l'éternel.
La communion de vos lèvres, secondes qui deviennent éternité. Ton cœur qui s'emballe sous la chaleur de ses doigts, ton cœur qui lui parle, plus encore qu'à toi. Elle l'entend, à tel point qu'elle peut le décrypter, avouer de sa voix murmurée ce qu'il dit, ce palpitant en émoi, ce palpitant bercé d'envies qui grandissent en toi. Il parle de couleurs, de lumières, de peur et d'élan. Il parle le même langage que la nuit. Il s'acoquine avec la lune, dans cet instant divin, de ces moments inscrits dans le marbre de l'éternité. Qui sonnent le glas de la fraternité. Car cette peur est bien là, réelle, véritable, de celle qui font encore à cet instant trembler tes doigts. L'alcool te maintient à flot, pour l'instant, mais tu sais déjà comme tes insomnies seront plus intenses, l'aveu une fois consommé. De fraternité, plus d'existence, lorsque tu ne seras plus en capacité de donner sa vie pour en sauver d'autres. Lorsque tu ne respecteras plus toi-même ta propre égalité. De celle du nombre.
Ses yeux verts qui se posent dans les tiens, s'y fixent, brillent de mille feux en l'antre de ton âme. Ses prunelles en lesquelles tu plonges les tiennes, leur acier qui s'y reflètent. Tu y lis tout l'espoir qu'elle t'évoque, toute la tendresse, cette douceur de la flamme qui tendrement vacille en elle, cette flamme que tu as modelé, transformée, en laquelle tu as soufflé l'inflexion de ton calme. Oh combien différente elle était, avant de te rencontrer.
Tu te plonges en ce visage que tu sais pouvoir dessiner sans que les étoiles ne t'offrent un rayon de lumière. Tu la connais par cœur, de la douceur de sa peau à la tendresse de sa voix ; pourtant, tu découvres ce soir la chaleur de ses lèvres, ce papillonnement qui t'enserre le cœur. Elle a toujours sa main dessus, elle sent, elle, elle sent bien tout ce qui te fait ainsi chavirer, devine ce qui en ton esprit s'amoncelle tendrement, doucement, mais si farouchement en même temps. De la hardiesse de ton désir, à la tendresse de la découvrir. ▬ Je n'ai pas besoin de ma lumière, tant tu irradies de la tienne. Murmure. Celui qui répond au silence. Celui qui fait vaciller l'obscurité. De celui qui fait valser vos pensées dans une utopie commune. Rassemblement de vos deux unités, pour la supériorité d'une même entité. Tu fais glisser ta main sur son visage, t'abreuves de la douceur de sa peau, de celle qui luit tendrement dans la lumière des étoiles. La lune comme seule concurrence, comme seule comparable. Devenue à tes yeux son égale.
Et vous voilà, là, à califourchon, l'un face à l'autre, vos regards se fondant en les prunelles amies, les prunelles si souvent vues, connues, dans lesquels vous aimez à vous perdre, comme un hommage au silence, au calme lunaire et aux lumières stellaires. Ta main qui toujours dessine des courbes sur sa joue, l'instant qui semble s'être arrêté, l'éternité qui vous tend les bras, tendrement, délicatement. La hardiesse de ton envie, de tes désirs qui naissent désormais, alors que tu rapproches encore sa bouche de la sienne, y dépose à nouveau un baiser d'une tendresse irréprochable, t'éloigne à nouveau d'elle, dans un ballet incessant. Le ballet des silences et de l'élan infini. ▬ Je vois désormais cette couleur. Je vois la couleur de l'espoir en tes yeux. Je vois celle de l'erreur. Je vois celle de l'apprentissage. Je vois le soutien de la lune, et la colère des étoiles. Je vois le poème que nous vouerons à la nuit, ce soir. Tes lèvres qui se posent sur les siennes, plus durablement cette fois, qui ne se décident plus à les quitter. L'éternité qui se fonde en ce baiser.
Ton corps qui se rapproche du sien, naturellement, comme poussé par les vents du destin. Ta main qui s'empare de son dos, glisse au creux de ses reins, la douceur dans chacun de tes gestes, enflammés toutefois de la chaleur de désir qui, peu à peu, prend possession de toi. La peur de la perdre, cette crainte terrible, cette adrénaline et la boisson qui réchauffe ton âme, ce mélange étrange d'émois divers qui mettent à mal l’Olympie de ton calme.
Ton corps contre le sien. Les frissons en ton sein. Tes mains qui glissent sur sa peau diaphane, nue, sauvage.
Vos corps dénudés offerts à la lune comme un mirage.