@"thoron's family".

Elle attend, Satine.
Elle attend que le cor retentisse, que la chasse soit ouverte. Le soleil est déjà haut dans le ciel, et les courtisanes forment un groupe de corbeaux voletant autour des hommes. Attendant, dignement, qu'ils se couvrent de gloire en ramenant le plus grand nombre de proies.
Satine éponge son front déjà bien chauffé par les rayons meurtriers du soleil. Sa longue robe la rend peut-être plus digne que certaines autres, et son statut de favorite lui octroie une place de choix. Nul ici n'ignore qu'elle est la femme du roi. Celle qui murmure à son oreille, dans le confort de ses draps.

Son regard fouille les environs. Les hommes se préparent, montent leur jument, c'est bientôt le grand départ. Elle voit Barahir à qui elle adresse un délicat sourire, mais il n'est pas celui que son regard tente de rencontrer. Il est là, Leandry. Préparé. A ses côtés. Et son regard se plonge dans le sien, pas assez discret, c'est certain. Ce regard dans lequel brûle la flamme de son amour, qu'elle veut crier au monde entier.

Le soleil est haut dans le ciel, réchauffant avec tendresse les premières festivités du printemps. il y a dans l'air un parfum de renouveau, de ces climats qui adoucissent les cœurs, d'une nature encore endormie qui s'éveille lentement. La Grande chasse sera bientôt ouverte et nul doute que le territoire Thoron tremblera sous les sabots des cavaliers. De toute part, les hommes et les femmes s'agitent, chevaux parés des plus beaux harnachements, dames vêtues des plus belles robes. Venom ne prend pas part à la chasse; mais ce n'est guère par convictions ou par manque de compétences. Il y a seulement bien trop de rumeurs et d'opportunités à saisir depuis la terre ferme, plutôt que sur la selle d'un cheval. La reine l'a d'ailleurs bien compris. Ainsi, se tenant à proximité des attroupements de courtisanes, il contemple le temps somptueux avec une pointe d'amertume, regrettant de ne pouvoir faire voler ses aigles à leur guise : il serait bien hors de question de les exposer aux arbalètes menaçantes des chasseurs. Mais ses yeux ne restent pas bien longtemps immobiles, glissant sans cesse en direction des invités, épiant leurs gestes, leurs attitudes et les sourires qu'ils s'adressent.

Le roi Baharir apparaît le premier, puis le prince se hisse en selle, imité par de nombreux cavalier. Avec un amusement tout juste dissimulé, Venom, croisant les mains dans son dos, les observe tourner œil et amour dans la même direction ; les imitant, son regard sombre rencontre sans tarder le délicat profil de la favorite du roi, à quelques pas de là, et à cette image, son expression redevient sérieuse. Cette passion qui la dévore ne peut passer inaperçue et assurément, la discrétion n'est pas le fort de cette âme sûrement trop pure, trop franche. Soupçonneux, méfiant, mais pas idiot, l'homme aux habits noirs se contente d'adresser un regard appuyé à la jeune femme. Une poignée de secondes qui en paraissent des milliers, jusqu'à ce qu'il parvienne à capter une once d'attention. Jusqu'à ce simple mouvement de menton, salut silencieux, respect feint, l'ombre d'un sourire se glissant sur ses lippes qui, si elles pouvaient se faire entendre à cette distance, lui conseilleraient de se montrer plus prudente.

 
@"thoron's family".

Le doux regard de Leandry qui croise le sien, et le sourire qui - instantané - fait vibrer son sein. Il s'arrête sur elle, longuement, bien trop d'ailleurs pour que cela paraisse véritablement innocent.  Elle rougit un instant, la petite perle, de cette jolie couleur qui rehausse son teint  pâli par les mauvais temps d'autrefois. Et voilà que le soleil pointe le bout de son joli nez, pour blondir un peu les longs cheveux qu'elle porte tressés. La douce voix d'Aurum la sort de ses pensées, la tire de cet amour qui souvent la fait valser. Mais le sourire, lui, ne quitte pas son joli visage. Pire encore, il s'agrandit, à la vue de son ami. Il est beau, tout de bleu vêtu, sa tenue rend de toute beauté la posture altière de son port de tête. La noblesse dans l'âme, la dignité dans le coton qui l'enveloppe, à défaut du hasardeux destin familial qui lui seul décide du statut des hommes, les sanctionne.
Il imite le roi, de sa grosse voix, et Satine entend les maîtresses pouffer derrière elle. Dignement, elle se contente d'un sourire élargi, d'un rire affranchi. ▬ Ne t'inquiète pas pour mes cheveux, je les ai protégés de cette huile que tu m'as conseillée. lâche-t-elle, jetant un regard amusé sur lui. Ce murmure que tu rétorques au creux de son oreille, là où tu glisses souvent tes pires secrets. Et la petite perle qui perd toute prudence lorsqu'elle frôle de sa main chaste la joue de son ami. Tyrannie de la confiance. ▬ Ne te blesse pas avec le carreau de ton arbalète, je te rappelle qu'il faut tirer devant toi. Un regard sur l'arme qu'il porte fièrement sur son dos, et l'inquiétude au fond des yeux. Trois de ses hommes se risquent ce jour. Trois de ces hommes prouvent leur bravoure.
Et un regard. Un regard qu'elle croise, un regard qui la fait frissonner. Le serpent. Le scorpion. L'animal sauvage, dangereux et coriace. Il lui adresse un hochement de menton, et ce sont ses yeux qu'elle baisse. Honte sur toi, petite perle. Honte sur la peur qui désormais habite ton cœur.

Le sourire de la favorite semble se figer, comme froissé par l'ombre d'une main maléfique, lorsque son regard croise celui de l'homme vêtu de noir. Le vue ne Kendassa elle-même ne pourrait la rendre plus humaine, sans doute intimidée par l'oeil noir de Venom, qui, loin de s'en offusquer, se contente de détourner le regard, soudainement happé par d'autres horizons, la laissant ainsi seule, seule dans son malaise. Une femme vient d'arriver et déjà est-elle lancée en grande conversation avec le prince. Il ne prend pas la peine de tendre l'oreille ou de déchiffrer sur leurs lèvres les banalités échangées. Il se détourne vers un palefrenier, au loin, conduisant un magnifique cheval ébène, aussi noir que sa propre monture. Et ce n'est qu'à cet instant qu'une nouvelle silhouette entre dans son champ de vision.

Une femme, au visage bien dessiné et aux joues roses, se présente devant lui. Le mouvement de sa robe, alors qu'elle progresse dans sa direction, laisse entrevoir à ses pieds des chaussures pensées pour l'équitation, mais Venom ne s'attarde guère sur ce détail. Elle l'aborde sans détour, et cela lui arrache un bref sourire. Il s'incline devant elle, brièvement, révérence officieuse qui relève de la politesse, plus que de la tradition. Je suis, il me semble, bon cavalier, mais piètre chasseur. Ce n'est pas tout à fait vrai. Il se redresse lentement et ses mains regagnent son dos, alors qu'il se maintient parfaitement droit. Par-dessus l'épaule de la femme, son regard glisse un bref instant sur la silhouette de Satine, avant de revenir à son interlocutrice. Pardonnez-moi, mais je ne crois pas vous avoir déjà rencontrée, par le passé. Sous-entendu fragrant; elle ne fait pas partie de la cour du roi, sans quoi, ils se seraient déjà croisés. Alors, d'un regard, il l'encourage à se présenter, quel que soit son rang.

@satine telemnar @valeriane tisserêve