nom, prénoms : Asmodee. Son nom, elle l'a perdu il y a bien longtemps. Pour certains peuples, le nom d'Asmodee représente la colère et la faiblesse de la chair. Littéralement son nom signifie "celui qui fait périr". âge, lieu de naissance : 34 hivers. Elle est née dans la cité de Til Garhyt. groupe : Sans hésitation, les Heledir. Asmodee a toujours soutenu leur cause. Et après la découverte faite par la Reine, d'autant plus. Sa cause est, par bien des points similaire à la sienne. ; métier : officiellement serveuse dans une taverne. état civil : Il est hors de question d'aimer dans ce bas-monde. Cela n'a pas sa place. Ceux qui aiment sont voués à souffrir, à reposer leur cœur dans la main de quelqu'un. Et cela elle ne tolérerait pas. Mais on ne choisit pas toujours. guilde : Les Scorpions sont venus la trouver à un instant où elle allait basculer. Arthur l'a sauvé d'une noirceur sans précédent. Avec eux, elle a redécouvert le plaisir de s'élancer à corps perdu dans une cause. L'élan indicible de la liberté. De la justice.



Asmodee est un être complexe à cerner. On peut penser qu'elle se fiche éperdument de ce qui l'entoure lorsqu'on réalise qu'elle vous a écouté depuis le début et n'a manqué aucun détail. Perfectionniste, elle ne laisse rien au hasard, surtout auprès de sa famille et de leurs agissements. Elle connaît le prix des erreurs.  — Mais la vie n'est pas qu'une horreur, et cela elle l'a découvert au contact de sa guilde, elle aime détendre l'atmosphère, basculer dans l'anticonformisme et faire preuve de cynisme si elle sent la tension beaucoup trop forte au sein de son groupe. — Loyale elle l'est comme jamais, elle sait l'importance de l'engagement. — Froide, de prime abord, elle reste méfiante même avec le temps. Elle ne veut rien laisser au hasard, ayant parfaitement conscience que les détails parlent beaucoup plus que le reste. — Contrairement à son chef, Arthur, elle est beaucoup moins douce et compréhensive que lui. Quand lui mise sur la paix, elle n'hésitera pas à tuer s'il le faut et possède beaucoup plus d'armes que lui. C'est principalement un de leurs sujets de discordes. Asmodee n'est pas en paix. Elle a ce sentiment aigre-doux qui vient parfois titiller son palais. Qu'elle ne sera jamais en paix. — Malgré le fait qu'elle monte à cheval depuis longtemps, elle a toujours été impressionné par ces bêtes. — Asmodee ne montre pas ses émotions. Seuls ceux qui tiennent à elle peuvent assister à cela. Elle estime, tout comme ceux qui tombent amoureux, que c'est une faiblesse.  Cependant, si l'on prête attention, vous pourrez peut être voir sa mâchoire serrée lorsqu'elle est en colère. Elle laisse échapper souvent un rictus en coin lorsqu'une situation l'amuse. Et si cela accompagne un sourcil levé, ne cherchez plus, vous l'avez beaucoup amusé. — Déçue et blessée par les hommes qu'elle qualifie de "porcs libidineux", elle croit profondément que la femme est faite pour dominer. Et qu'un jour, à force de combat, cela sera le cas. Elle ne recherche en rien l'égalité. —






ton pseudo : doomsday ! et Quandiraton sur les "réseaux". c'était il y a fort longtemps.  comment as-tu trouvé CWM ? : En me baladant dans la forêt.  Sur Bazzart.   et t'en penses quoi ? : Clairement je recommanderai pas. des trucs à ajouter/améliorer ? : Nan moi je trouve ça parfait.

Sooo. Quoi dire. Yavanna aka Doomsday, 26 piges. (eeeh ouuuui...déjà.) cela faisait quelques semaines que je pensais à revenir dans le monde du RP que j'avais momentanément retrouvé il y a trois ans mais, qui, en somme, ne fait plus partie de mes hobbies depuis six ans. et là poaaaah. Heart Attack. Scénario Heart Attack. Alors je me suis lancée.   et force est de constater que cela m'avait follement manqué.

AVATAR ▬ La splendide Rooney Mara.

« Mamà ?
- Oui ? »

Un temps de pause. Le petit garçon à la silhouette frêle savait que s'il posait cette question, quelque chose se glacerait en lui. Et se casserait.

« Est-ce qu'elle va mourir ? »

Elle savait que si elle lui répondait, quelque chose se glacerait en lui. Et se casserait. Mais elle n'était pas l'aînée de cette famille pour rien. Ils comptaient sur elle. A défaut de cet ersatz de génitrice hurlant dans la pièce en face.

« Oui. », répondit-elle de cette voix basse et déjà trop tôt éraillée par les années.

La jeune fille s'était appuyé contre le tenant de la porte de la chambre. C'est alerté par les hurlements que le petit l'avait rejoint. Dans cette pièce, il n'y avait que l'odeur de la mort à venir. Son effluve rance. Celle du sang séché et de la transpiration inondant les draps, en imprégnant le tissu autrefois immaculé. Asmodee serra la main de son petit frère. Assez pour qu'il sache qu'elle serait toujours là. Pas assez pour qu'il sache qu'elle avait peur.

En dépit de la haine crépitante qu'elle éprouvait, elle se posait la question de l'Après. Il serra sa main en retour. Et elle pouvait sentir tout le désespoir dans cette poigne de petit garçon. Et seule la mâchoire serrée de cette gamine témoignait de la tension qui s'agitait à l'intérieur de son cœur. Mais son regard ne fléchissait pas. Il restait, immobile. Acculant cette femme terrible. Qui un jour lui avait fait peur. Alors qu'aujourd'hui, elle n'éveillait que de la haine.

Ses prunelles vertes croisèrent un bref instant les bleues de l'homme en retrait dans la pièce. C'était, avec le médecin le seul individu réellement inquiet pour le sort de la femme dans ce lit poisseux. Parce qu'en dépit de son ignominie, il avait réussi à l'aimer. Cette tenancière de bordel et ses quatre marmots qui prostituait sa propre enfant.

Peut être cinq de marmots. Si l'enfant daignait se pointer. Et la tuer au passage. La vie avait déjà enlevé à Asmodee une sœur. Un jour ses poumons avaient commencé à se remplir de sang. Et elle toussait dans un sifflement sinistre.

Les nuits étaient terribles.
C'était il y a deux ans.
Douze ans c'est beaucoup trop tôt pour voir la mort en face.
Douze ans c'est aussi, beaucoup trop tôt pour faire des gâteries.
Mais ça remplit la casserole.

La main du petit garçon serrait d'une force peu commune sa grande sœur. Un idiot aurait compris qu'il était terrifié.

Ça y était. La petite était sorti. Elle hurla fort. Bien plus que les jumeaux avaient hurlé quand ils étaient nés. Arthemiev et Asaf étaient des petits discrets. Mais elle. C'était une battante. Asmodee le savait. Il ne pouvait pas en être autrement. Il ne peut en être autrement lorsqu'on naît dans la mort.

« Asmodee... », murmura la génitrice.

La jeune fille leva un sourcil et émit un reniflement dédaigneux. Elle pouvait bien lui accorder cela à la vieille. Elle allait y passer. Elle eut envie de vomir quand elle lâcha la main du petit. Le médecin voulut poser l'enfant sur la matrone mais elle refusa et indiqua Asmodee. On lui mit l'enfant dans les bras et derechef celle ci cessa de hurler, elle la fixait de ses grandes billes grises. Elle avait hérité de la blondeur de la mère. C'était étrange comme sensation. Cette petite chose toute chaude qui n'attend que de découvrir la vie. Et qui, lorsqu'il pose son regard s'en remet complètement à vous.

« Asmodee...c'est à toi de la nommer... », murmura faiblement la femme.

« Freyja! , voulut intervenir l'homme mais elle l'arrêta d'un geste.
- C'est ma décision. Ma dernière volonté, Elwyn. »

Le silence se fit alors que la sage femme tapotait le front trempé de sueur de sa patiente avec un tissu humide.

« Astalith. », répondit Asmodee.

Son petit frère s'approcha pour voir la nouvelle née et elle s'abaissa pour qu'il vit mieux. Quant au dénommé Elwyn, il serra les poings. Passablement énervé.

« .Ah eh bien elle est bien partie dans la vie avec un prénom pareil ! En faisant cela tu tournes le dos à ce qui a fait de toi ce que tu es. Nous ne soutenons pas les Gwelnaur pour te voir... », commença t-il.

Asmodee s'arracha de la contemplation de sa jeune sœur et leva le regard vers lui. Un regard incisif, brutal, tout en s'approchant de lui. Sa sœur serrée fort contre son sein.

« Excuse moi si tes parents ont préféré te donner le dérivé du prénom d'une tapette qui se promène avec des fleurs dans le cul. Et dans quelques secondes, il n'y aura plus de 'nous' qui tienne. », murmura t-elle.

Quand elle rendit son dernier souffle, cette femme qui avait passer sa vie à haïr le monde entier -ses enfants compris- sourit à ce qui allait demeurer son héritage. La trace de son passage sur terre. "Ne commets pas les mêmes erreurs que moi." furent ses derniers mots. Et ils étaient adressé à la jeune fille qui tenait son enfant.

Plus rien ne serait jamais pareil. C'était ainsi que les choses devaient arriver.
Et Asmodee se battrait plus loin que quiconque pour ceux qu'elle aimait.

Et s'il fallait tuer. Elle tuerait.
 




Pour tenir sa promesse, Elwyn l'avait tenu. Il s'était occupé d'eux. S'était chargé de leur éducation. Si bien qu'en dépit de leur caste sociale, les enfants savaient lire et écrire, compter et monter à cheval. Se défendre et avaient le verbe haut. Astalith, contre toute attente se montrait patiente et possédait un caractère affirmé. Elle savait déjà déchiffrer nombre de mots alors qu'elle n'était âgée que de six ans. Quand aux jumeaux, l'un était aussi studieux que l'autre était agité et indiscipliné. Arthemiev rêvait de devenir herboriste, de soigner les gens, en attendant de pouvoir se faufiler dans les interstices de la bourgeoisie, il faisait tout le contraire de sa vocation. Elwyn lui avait trouvé un forgeron pour devenir apprenti.

Asaf, quand à lui n'écoutait rien. Son rêve était de devenir poète, musicien. Il apprenait la sitar dès que son temps libre le permettait ainsi que des dizaines de tour de passe-passe et s'entraînait sur sa petite sœur émerveillée de le voir accomplir tant de prouesses. En un mot, c'était un pitre et il rêvait à la vie d'artiste, de saltimbanque.

Quand à Asmodee, elle était restée longtemps dans l'affaire de sa mère. Elwyn disait qu'elle était rentable. Les hommes aimaient le fait qu'elle ne leur sourit pas, ni qu'elle chercha à s'attirer leurs faveurs. Dans une énième dispute, Elwyn avait cédé et laissé trouver un autre emploi. Cela faisait trois ans qu'elle travaillait dans une taverne. Elle aimait le parfum des mets qu'elle servait, la bonhomie des gens exténués du voyage qui recherche un peu de réconfort et de repos avant de repartir explorer des contrées.

Des contrées lointaines, elle en rêvait. Et partir. Se délester du regard des hommes qui faisaient courir leurs pulsions immondes sur ses courbes félines.

La taverne était tenue par une femme à l'accent râpeux, mais dotée d'un sens de la justice sans précédent.

La nuit, quand elle avait terminé son service, elle ne rentrait pas tout de suite. C'était son moment de plaisir. Rien qu'à elle. Elle montait sur les toits et courait, se lançait des défis à elle même. Vais-je réussir à sauter d'aussi haut ? Elle soumettait son corps à la souplesse, à la gravité. Et elle rentrait, embrassait les jumeaux, puis, Astalith. Mais ne trouvait pas le sommeil tout de suite.

Il y avait quelque chose qui arrivait. Aussi sûr que son vingtième anniversaire. Elle le sentait. Et Asmodee avait toujours eu le flair pour cela. Un soir, avant la fin du service, elle avait senti que quelque chose était arrivé. Au moment où elle allait demander à sa patronne de quitter plus tôt, Arthemiev était venu la trouver pour lui dire qu'Asaf s'était cassé la cheville.

Ses craintes ne mirent pas longtemps à être confirmées.
Le lendemain, Elwyn était assassiné. Car son amour pour le jeu avait eu raison de lui. Et il y avait des gens à Til Garhyt qui n'aimaient pas qu'on se moque d'eux éperdumment.
Asmodee inspira profondément avant de toquer à la porte du notaire. Des centaines de questions se bousculaient dans son esprit. Elle ne pourrait pas à elle seule se charger de l'éducation de ses frères et soeurs. Et comment n'avait-elle pas pu remarquer quoi que ce soit du taux d'endettement de son beau-père ?

« Ah! Asmodee. Je t'attendais. »

Cette voix. Elle la reconnaissait entre mille. Elle pivota légèrement sur elle même et se retrouva face à lui. Il avait changé en huit ans. Mais elle aurait pu le reconnaître dans une foule de cent individus. Et cette odeur répugnante. Bien trop musquée, mélangée à de la transpiration. Elle serra fort sa mâchoire. Mauvaise habitude qu'elle avait pris dès qu'elle était tendue. A s'en péter l'émail.

Il ouvrit la porte de son cabinet et l'invita à rentrer. Mais Asmodee ne pouvait plus émettre un seul geste. Elle s'était juré pourtant. Pour elle, pour sa famille de ne pas connaître l'irréparable. C'était lui. Au bordel de sa mère, il y a huit ans. Le premier porc à avoir posé sa main sur elle. Si ce soir, sa mère l'avait appelé c'était parce qu'il ne cessait de réclamer des filles plus jeunes. Bien trop jeune.

Si depuis ce soir elle a toujours un couteau aiguisé sur elle c'est à cause de lui.

Elle avança d'un pas. Puis de deux. La nuque raide, le regard fixe. Et ce stupide sourire qu'il ne cessait d'arborer.

« Je t'ai connu moins timide ! Bref. Passons. Comme tu t'en doutes, Elwyn n'a pas laissé grand chose si ce n'est...des dettes...il vous lègue cependant la maison minable dans laquelle vous habitez car il l'avait acheté à prix coûtant lorsqu'il avait commencé à fréquenter ta mère. », annonça t-il en se raclant la gorge.

« Cependant. Il avait senti le vent tourner il y a peu et était venu me voir en me demandant de préserver une maigre somme au cas ou. », continua t-il sans cesser de regarder Asmodee, le regard perçant et porcin.

« Mais il va falloir être très sage. »

Son ton ne souffrait d'aucune hésitation. Quelque chose à cet instant précis s'éteignit dans l'esprit de la jeune femme. Elle était devenu un automate.

« Tu as toujours su te montrer exemplaire. »

La lèvre inférieure d'Asmodee tremblait. Ses mains n'étaient plus que deux poings serrés. A son oreille, elle pouvait sentir ses dents grincer sous l'effort déployé. Il fallait qu'elle se maîtrise.

Pour elle, pour sa famille.

Il se leva en lissant son bouc. Cet homme aurait pu être beau s'il n'avait pas été atteint de tels vices. Et c'était cela le pire. La plupart étaient malheureux, gras et adipeux, frêles et chétifs, ridicules et pathétiques.

Lui était bien pire que cela.

Il posa une main sur son épaule et murmura à son oreille de sa voix basse.

« Pense à ta famille. Et puis, on s'amusait bien tous les deux ? Tu me manques un peu. D'aucune ne possède ton flegme, cette indifférence. »

Il fallait qu'elle tienne. Elle pensait à ça lorsqu'il redescendit sa main plus bas. Que son souffle se fit plus pressant. Il fallait qu'elle tienne pour elle, pour...

Elle ne réalisa pas tout de suite.

Le coupe papier dans sa main et l'autre qui se tenait le cou en la regardant stupidement. Elle se leva prestamment, et continua. Il était trop tard de toute façon.

Elle ne savait pas que l'humain pouvait saigner autant. Mais elle ne s'arrêta pas. Elle ne cessait de lui asséner des coups. Il payait pour tous ceux qui se permettaient de prendre ceux qui osaient prendre à des femmes qui allaient les dégueuler juste après. Jusqu'à la bile. Ce n'est que lorsqu'elle eut terminé qu'elle réalisa ce qui venait de se passer. Elle récupéra l'enveloppe cachetée d'Elwyn et s'en alla en direction de la taverne de Molly.

Il était tard et elle savait très bien qu'à cette heure ci, rares étaient les clients. Molly aimait le jour, Molly était lumière. C'était ce qu'elle se répétait tel un mantra. Elle pensait aux petits. Elle crevait de peur.

« Asmodee... », fut la seule réaction de sa patronne lorsqu'elle se faufila au bar par la porte de derrière. Heureusement, il n'y avait qu'un vieil ivrogne qui cuvait sur une chaise à l'équilibre bancal.

« Je sais pas. Je sais pas. Je sais pas. Il a voulu. Et je voulais pas. Je veux plus. », elle débitait fort.

Vite. Molly alla cherche une serviette l'enroula dedans puis la serra fort dans ses bras. Elle semblait connaître ce genre de situations et cela n'était pas étonnant. Asmodee éclata en sanglots. Et elle s'aperçut que cela faisait des âges qu'elle n'avait pas pleuré. Et cela faisait du bien. Là, dans la poitrine de Molly elle vidait tout ce qu'elle avait gardé, bloqué dans la gorge, pourrissant sur les flancs.

« Ne laisse pas ces bâtards t'anéantir. C'est ainsi Asmodee. C'est toi ou eux. Tu comprends ce que je te dis ? »

Elle leva son regard brûlant vers Molly et hocha la tête.

« Je veux te l'entendre dire.
- Je ne laisserai jamais ces bâtards m'anéantir. », souffla t-elle

« Allez maintenant va te laver, je vais aller chercher tes frères et sœur ainsi que quelques affaires. Et j'appelle Gustav. Il me doit un service et possède deux carrioles. »

Avec la promesse de revenir un jour, assez d'argent pour voir de quoi venir et sa fratrie, Asmodee quitta la ville maudite ce soir là, le cœur lourd mais la conscience apaisée.

« Ne laisse pas ces bâtards t'anéantir.
- Mhh...quoi Mamà ?
- Rien ma puce, rendors toi. »

Après tout ce temps. Après tout ce qu'elle avait fait pour les protéger. Les emmenant jusqu'à Garaldur pour les préserver de la folie des hommes. Les emmenant sur le territoire de ceux à qui elle avait prêté allégeance. Mais la folie n'était jamais loin. On reste tous un taureau au milieu d'une arène. On ne trouve jamais d'issue. Et notre fin. Inéluctable. Elle avait senti. Poindre la même boule qu'il y a des années. Plus forte cette fois ci. Elle avait couru. Elle avait couru jusqu'à ce que ses poumons ne soient qu'un brasier sans nom. La femme qui était venu la trouver à l'auberge n'avait pas caché l'horreur sur son visage. De ceux qui n'ont jamais vu la mort dans le blanc des yeux.

Ce malaise. Elle l'avait senti dès le jour levé. Mais elle avait refusé d'y prêter attention. Parce qu'au bout de sept années de paix, elle espérait que cela ne fut rien d'autre qu'un fourvoiement de son cœur.

Et elle était là. Dans cette grange aux relents de merde. Les gens s'étaient attroupés pour voir mais les jumeaux les empêchait de passer, ainsi que le forgeron du village qui s'était lié d'amitié avec la famille.

« Asmodee. Que fait on ? On ne pourra pas les retenir inlassablement ! », hurla t-il.

Mais elle n'entendait plus rien.

Il n'y avait plus rien à entendre.
Il ne régnerait dans son âme à présent que le silence.

Et tout cela. Ce n'était que de sa faute à elle. Parce qu'elle n'avait pas su protéger les siens. Parce qu'elle avait choisi le lieu de travail le plus exposé pour les siens.

Quand il était arrivé, ce chevalier Thoron, tout le monde l'avait détesté. Le peuple des Heledir, depuis quatre ans, savait parfaitement quels traîtres ils étaient. Et le Peuple des Heledir était un peuple droit, juste et loyal. Voilà pourquoi Asmodee les avait choisi. Et ils le lui avaient si bien rendu. Il devait rester pas plus d'une semaine dans l'auberge.

Astalith venait rendre souvent visite à son aînée. Byggvir, le tenancier, la laissait toujours goûter les plats qu'il confectionnait car elle avait un palais extraordinaire. Astalith allait avoir quatorze ans. Et elle était d'une beauté sans nul autre pareil.

Et cela n'avait pas échappé à ce chevalier. Il lui avait fait quelques avances, de plus en plus forcées. Mais Astalith n'allait se donner à lui. Asmodee l'avait éduqué à sa manière. Elle lui avait répété les enseignements de Molly. Et lui avait raconté ce qu'elle avait été obligé de faire.

Quelques mois plus tard, il était revenu. Toujours la même rengaine. Alors Astalith avait cessé de venir à l'auberge lorsqu'il était dans les parages.

Astalith avait toujours été plus vive, avait toujours senti quand le vent devait tourner. Bien plus que sa sœur.

« Asmodee. Je crois qu'il faudrait qu'on s'en aille. Il a essayé de me parler tout à l'heure. Et je te jure que ses yeux sont plus que clairs. »

C'était hier.
Et maintenant, son corps était là. Désarticulé dans la paille, des traces pourpres autour du cou. Du sang qui s'écoulait de ses jambes.
Ah elle est belle la noblesse.

Elle tue des enfants dans la paille. Mais qu'est ce que cela peut faire. Puisque nous ne sommes rien. La plèbe. Les enfants du peuple ne sont rien que de la chair à canon.

« Asmodee ! »

Asaf. Dans sa voix, un sanglot non contenu.

« Il doit pas être bien loin, il a pas du partir il y a plus de trois heures ! Il faut le retrouver ! On peut cavaler, même de nuit ! », hurla Arthemiev.

Asmodee s'accroupit et dégagea une mèche de cheveux de sa soeur. Elle ne l'entendrait plus rire aux facéties de son frère. Elle ne la verrait plus froncer les sourcils devant un exercice particulièrement compliqué. Elle s'autorisa de laisser quelques larmes rouler alors que sa respiration se faisait saccadée. Elle se l'autorisa parce qu'elle savait que son cœur deviendrait si froid et sec que rien n'en passerait plus jamais la porte.

« Asmodee.»

« Non. Dis leur de préparer un brasier si grand que même Saeryn lui même le voit et en tremble. », murmura t-elle

La suite est floue. Les flammes léchaient le corps de sa soeur. Ses deux frères serraient sa main si fort qu'ils la broyaient. De part et d'autre de leur aînée. Car c'était à présent à leur tour de la protéger. Dans un jour, une semaine, un mois, un an, Asmodee retrouverait le Chevalier.

Et il faudrait qu'ils soient là.
La vie est une tordue. Elle vous délie, vous tord.
Jusqu'à la rupture.




« Ecoute moi bien, si il continue à te fixer comme ça, je lui fais bouffer sa choppe. Il veut te bouffer le croupion ou quoi ? », murmura Byggvir à l'oreille d'Asmodee alors qu'elle ramassait un plateau rempli de choppes d'hydromel.

Un léger rire secoua un instant la poitrine de la jeune femme et il se retourna vers elle. Depuis un an, il était complexe de la faire rire. Elle n'avait plus jamais été la même après "L'Evenement". Et Byggvir n'avait jamais compris pourquoi elle ne cherchait pas réparations. Des rumeurs couraient que le chevalier était arrivé à la capitale il y a quelques jours. Une pure folie quand on savait dans quel état de colère se trouvait la Reine. C'était un de ses amis qui le lui avait dit. Lorsqu'il avait annoncé la nouvelle à Asmodee, elle avait levé un sourcil et lui avait répondu "Je le sais déjà."

Byggvir avait peur. Et c'était rare pour un homme de sa trempe. Il avait peur parce que cette gamine elle en avait bavé. Quand elle était venu le voir, il y a quelques années, avec toute sa marmaille, envoyée par sa chère Molly, il l'avait mal regardé. Ici, les étrangers, on ne s'en méfiait pas avant. Mais maintenant c'était tout autre chose. Il n'avait pas fallu longtemps pour qu'il lui fasse confiance. Elle était agile, vive, perçante dans sa répartie. Et forte. Si forte qu'elle arrivait parfois à l'impressionner. Ca aussi c'était rare.

Depuis que la petite était partie, Byggvir l'avait regardé accomplir son devoir de mère sans jamais ciller. Sans jamais fléchir. Elle ne s'autorisait aucun plaisir, aucun sourire. Aucun homme n'était parvenu à la déchiffrer, à aller plus loin que quelques mots. En somme. A l'exception du forgeron et de Byggvir, elle les méprisait.

C'est bien pour cela que cet homme au regard acéré l'inquiétait. Cela faisait trois jours qu'il était là. Il venait, s'asseyait à la nuit tombée, consommait deux choppes. Pas une de plus, pas une de moins. Il restait une heure. Pas une minute de plus, pas une minute de moins. Ne parlait à personne et fixait Asmodee. Ce qu'il n'avait pas en revanche c'est le verbe haut et le regard lascif. Non. Ses yeux ne cherchaient qu'une seule chose. Ceux, ternis par la vie d'Asmodee. Quand elle lui apportait sa boisson, il ne laissait pas courir son regard ailleurs que dans le sien. Et c'était cela qui intriguait Byggvir. Ses gestes étaient précis, utiles, rien n'était laissé au hasard. Il n'avait vu cela que chez une seule personne.

Asmodee.

Elle savait qu'elle n'y couperait pas. Elle avait retardé ce moment dès qu'il avait mis un pied dans l'auberge. Viendrait l'instant où elle devrait le regarder. Peut être était-ce simplement cela qu'il voulait ? Elle n'avait jamais rencontré un homme pareil. Il ne l'interpellait pas. Il ne la déshabillait pas. Elle ne sentait pas d'odeur rance quand elle s'approchait de lui. C'était un mélange de bois et d'encens. Cela aurait pu être apaisant si elle n'était pas constamment sur ses gardes.

Elle allait lui donner ce qu'il voulait. Après tout. Le dernier homme qui avait voulu la toucher contre son gré en avait payé les frais. Elle leva ses prunelles pour venir les planter dans celles acier.

Un étau serra son estomac. Elle n'avait jamais rien vu de similaire. Il y avait le chaos, il y avait le même regard que ses frères quand ils voulaient lui transmettre un message important, il y avait la douleur mais aussi, la joie, celle qu'on dissimule pour ne pas mettre en colère ceux qui n'ont plus la sensation sur le bord du coeur. Et il y avait un gouffre. Immense. Il soutenait son regard. Il ne cillait pas. Et il n'y avait que ses yeux. Mais il n'y avait pas de haine. Il n'y avait pas de colère. Il y avait quelque chose de repu. Quelque chose d'entier. Et c'était réconfortant. Ca voulait dire "Tu peux lâcher prise. Maintenant. Tu as le droit."

« Asmodee ? », la voix de Byggvir résonna dans sa tête, la faisant sortir de sa torpeur. « Ca va ? Non mais parce que si tu veux lui bouffer le croupion aussi, faut y aller. »

Elle sourit encore plus. C'était agréable de sourire. Elle ne se souvenait plus du son de son propre rire.

« Non. Ce n'est pas ça. C'est autre chose. », s'entendit-elle dire.


Sa décision était prise. Elle embrassa d'abord Arthemiev qui émit un petit gémissement dans son sommeil puis alla dans la chambre d'Asaf. Elle aimait sa chambre. Il y avait plus d'instruments qu'elle n'avait de doigts, y régnait un joyeux bazar. Elle s'attarda sur son visage. Il n'avait que quatre ans la première fois qu'il s'était réfugié, apeuré par l'orage dans son lit. Puis son autre frère était venu, ne le trouvant pas. Ces deux là étaient sa chair. Là où elle irait, ils iraient. C'était ainsi. C'était comme ça. Mais pas ce soir. Ce soir, c'était son combat. Elle avait déjà tué. Elle ne voulait pas leur laisser une seule occasion de noircir leurs âmes. Ils en avaient assez vu comme cela.

Elle savait qu'elle en reviendrait. Pour eux.

Dehors la lune était quasi-pleine, l'air était frais mais demeurait doux. Le printemps arriverait. Sous peu. Mais il ne la verrait pas renaître, elle.

Asmodee se dirigea vers sa monture, tout était prêt. Les dernières informations avaient été reconfirmées. Le Chevalier Bélial était bel et bien en chemin pour revenir chez lui. Elle savait exactement quelle route emprunter. Combien de fois elle s'était figuré cela. Il n'était accompagné que d'un seul homme. Et cela était plutôt rare pour le souligner. Elle n'aurait aucun mal à le maîtriser. Elle s'était entraînée avec le forgeron. Des mois et des heures.

Elle était prête.

Alors qu'elle caressait sa monture elle sentit une odeur. Et elle la reconnaissait.

« Vous ne devriez pas faire cela, Asmodee. Il n'est pas trop tard. », sa voix était grave, puissante et pourtant il n'avait pas haussé le ton une seule seconde.

Personne ne se mettrait entre elle et lui. La lame vint trouver le chemin de la gorge de l'inconnu si facilement qu'elle se surprit elle-même. A sa grande surprise, il ne sourcilla pas. Se contentant de lever les deux mains en signe de paix.

« Qui êtes vous bordel ? Parce que je n'hésiterai pas. Je préfère vous le dire. », murmura t'elle en se rapprochant, la lame toujours plaquée sur la peau d'albâtre de l'inconnu.

« Je sais, Asmodee. C'est bien pour cela que je veux vous arrêter avant qu'il ne soit trop tard. Et c'est aussi pour cela que j'ai besoin de vous.
- Il est déjà trop tard. Maintenant. Qui êtes vous ? Comment est-ce que vous pouvez en savoir autant sur moi alors que je ne sais rien de vous ? Qu'est ce que vous faites depuis trois jours ?
- Voilà bien des questions. Et comme toujours il y a plusieurs réponses à une question.
- Est-ce que vous donniez l'impression d'être en position de jouer à cela ?
- Je ne joue à rien, Asmodee. Je vous offre une chance. De rédemption.
- La rédemption ne pourra jamais s'obtenir. J'ai perdu ma foi dans des guerres saintes, monsieur.
- Qui je suis. Arthur. Mon nom est Arthur. Et ce que je fais ? Je vous observe. Parce qu'il est hors de question qu'une personne possédant un potentiel tel que le votre se fasse happer par les ténèbres. Je ne le tolérerai pas. Je connais un homme qui vous connait. Qui vous estime beaucoup. Il est forgeron dans cette cité.
- Qui me dit que vous ne mentez pas ? Que vous me voulez du bien ?
- Voulez-vous la réponse du savant ou du poète ?
- Foutaises. », elle émit un reniflement dédaigneux. Mais elle savait. Que quelque chose était en train de se préparer. Quelque chose qui la changerait à tout jamais. C'était la même boule au creux de l'estomac. Mais elle annonçait autre chose de plus délicieux qu'un danger. Un danger choisi. Bon sang. Elle n'allait pas céder. Elle tenait sa revanche, à la portée des doigts.

« Celle du savant.
- Demandez le au forgeron. Il habite à deux pas d'ici. »

Un silence se fit. Elle le jaugeait, dans l'obscurité. Son visage apparaissait brièvement à l'éclat de la lune. Elle relâcha la pression qu'elle exerçait sur sa gorge et se rapprocha. Son regard ne voulait rien manquer de ses réactions. Au moindre mouvement de ses prunelles.

« Et celle du poète ?
- Tu l'as toujours su Asmodee. »