Cela faisait maintenant quelques jours que Juliana était en ville avec ses parents et que l’annonce du mariage allait être prononcé par la reine. L’angoisse montait doucement, elle aurait voulu se réfugier dans les bras de son ainée, pourtant c’était impossible. Elle savait que Cassiopée ne serait pas présente, qu’elle ne pouvait pas prendre le risque de s’infiltrée au château simplement pour entendre l’annonce de la reine. Installée dans une des chambres du palais les domestiques finissent de préparer la jeune femme pour l’événement. Il fallait qu’elle fasse bonne figure ce soir, qu’elle se montre digne de ce titre qui allait lui être offert, elle n’avait pas le droit à l’erreur. Se regardant une dernière fois dans le miroir elle sourit avant de se lever. Elle est prête et l’appréhension monte encore plus, soupirant alors qu’elle est seule elle s’approche du petit balcon. Juliana peut voir l’agitation qui s’installe dans la population, de nombreuses personnes rentrent alors que d’autres attendent dehors. Rapidement un valet vient la prévenir qu’il était l’heure. Un dernier regard sur l’extérieur et Juliana suit silencieusement l’homme. Elle espère pouvoir rapidement rejoindre ses parents ou bien même une connaissance pour l’apaiser ne serait-ce qu’un peu. Soufflant une fois derrière le rideau elle le pousse curieuse de voir la salle, déjà pleine de monde, ce qui angoisse encore plus la demoiselle. Et si le peuple ne l’aimait pas ? Beaucoup de questions s’installaient dans sa tête.

Le château était plein à craquer d'invités, mais Lovell trouvait qu'il faisait particulièrement froid entre ses murs. Si des gardes ne l'avaient pas accompagné pour descendre, jamais il n'aurait quitté sa chambre. Il se répétait les mots suivants en boucle, pour s’apaiser ou pour se convaincre, lui-même n’était pas certain de la réponse : « Je dois rendre le peuple d’Heledir fier, et c'est tout ce à quoi je dois penser maintenant. Je suis né pour ça après tout. »

Seul derrière la porte massive qui mène à la salle de réception, il tremble. Il fait presque noir là où il se trouve, seule une maigre chandelle éclaire la pièce, toutes les autres à disposition dans le château ayant été réquisitionnés pour l’occasion. Son plastron un peu trop serré est la seule chose qui le fait encore se tenir droit, tandis que sa respiration est si forte qu'elle couvre presque le bruit des invités qui résonne dans sa tête. Il n’est pas prêt, le gosse. Rien ne l’a préparé à la vie conjugale, au mariage, et aux obligations qui vont avec. Il sait pourtant que lorsqu’il sera Roi, il pourra prendre autant de maîtresses qu’il le souhaite et délaisser Juliana une fois le premier héritier né, mais ce n’est pas ce qu’il veut. Il veut être un homme bon, lui rendre agréable cette vie qu’elle n’a pas choisie… Mais est-ce possible pour la jeune femme de se contenter de ça ? Aucune idée… Tout ce qu’il sait, c’est qu’il n’est pas prêt.

Quand l’orchestre se tait enfin après de longues secondes, Lovell ne remarque pas toute suite qu’il n’entend plus les bruits autour de lui. Il se sent comme dans une bulle, comme s'il retenait sa respiration sous l’eau. Il remarque alors que c'est le cas, qu’il commence à manquer d’air, et se force à expirer. Au loin, le jeune prince entend une voix dire quelque chose tandis que les portes s'ouvrent, déversant la lumière des chandeliers sur lui, tels la boîte de Pandore et les maux du monde.

Il se sent comme englouti par la foule.

Les regards ne le quittent pas, détaillants les moindres détails de son corps, le déshabillant de leurs yeux trop curieux. Il les sent glisser sur sa peau et sous ses couches de vêtements. Le Prince est comme une attraction pour eux. Le futur Roi, l’oiseau rare qui ne sort jamais de sa cage dorée, soudainement exposé au grand jour. Sa respiration se fait plus forte, et plus rapide. Il cherche du regard un visage familier ou juste quelque chose auquel s’accrocher, en vain.

Soudain, comme un écho, son nom et son titre sont annoncés, et la musique recommence.

Il prend alors place à la table royale, à la droite de sa mère. Cette dernière ne devrait d’ailleurs pas tarder à faire son entrée. Sous la table, il sort deux objets de sa poche. L’un miroite de mille feux sous la lumière rougeâtre des bougies, l’autre est légèrement froissé. Une bague et une lettre.

Sa mère, la reine, entre enfin en scène. Le jeune prince relève alors la tête avec un automatisme presque mécanique, et souri au monde de la façon la plus fausse possible. Il n'est pas prêt.


Ps : Promis, je fais plus court au prochain post.

Juliana était angoissée par cette soirée, elle savait qu’à ce moment précis sa vie allait être liée à celle de Lovell. Certes ce n’était pas le mariage, mais l’annonce était tout aussi importante. C’était la première fois que la jeune femme allait apparaitre comme futur épouse du prince, celle qui allait devenir reine par là suite. De quoi envier de nombreuses femmes. Le bracelet d’Ambroise accroché au poignet elle a le cœur lourd, elle sait que tout sera fini ce soir qu’il sera bientôt prêt à repartir pour Galadhorn et donc qu’elle ne le verrait plus. Il ne faut pas qu’elle pense à ça se soir, elle doit sourire et montrer la fausse joie qu’elle a d’épouser le prince, car oui Juliana aurait préférée qu’il en soit autrement.  Elle pousse alors le rideau pour rentrer dans la pièce déjà pleine à craquer, son angoisse ne fait que monter progressivement. Elle est à la recherche de personne qu’elle connait ses parents, mais surtout pas Ambroise, elle ne voudrait pas avoir à le croiser du  regard, cela serait bien trop douloureux pour elle. Voyant ses parents au loin, Juliana s’approche et vient à bousculer Ambroise sans le faire exprès. Son cœur se serre. Il était magnifique, de plus elle avait remarqué qu’il avait mis les boutons de manchettes qu’elle lui avait offert quelques jours avant. « Oh Ambroise je… » dit-elle avant d’être coupée par le silence de la salle.

L’entrée de la reine se fit assez rapidement, ainsi que celle de son futur époux et celle de la princesse. Un large sourire sur le visage Juliana s’approche de plus près elle sait qu’elle va finir par être appelé, elle aurait tellement envie de fuir, et pourtant c’était impossible. Elle croise rapidement le regard de ses parents, elle leur sourit simplement, un sourire faux bien qu’il semble bien réel pour tous. Juliana garde la tête haute, elle se doit de paraître forte, une femme digne de cette union qui l’attendait. Elle ne pouvait décevoir personne ce soir. La voilà qui entend son nom, elle s’approche une large sourire sur les lèvres avant de s’installer aux côtés de son futur époux @Lovell Heledir. Elle est silencieuse, elle ne sait pas vraiment quoi dire. Tous la regardent, l’observent et les bavardages se font entendre dans la salle. « Nous y voilà donc. Je ne pensais pas que les nobles seraient aussi nombreux ce soir. » confit-elle à Lovell alors qu’elle se tient à ses côtés. Elle est angoissée, elle aimerait qu’il l’aide à traverser ça au moins la rassurée.

Sa sœur vient se placer à ses côtés, à gauche de sa mère. Il aimerait lui confier son angoisse et sa peur, mais le moment est particulièrement mal choisi. Tant que j'honorerai ma famille, tout ira bien, se dit-il une nouvelle fois. Mais cette jeune femme en fera bientôt partie, je devrais donc l’honorer aussi de la même manière ?

Le jeune prince est arraché à ses pensées par le silence pensant qui s’abat soudainement sur la salle. Il lisse la bague du pouce avant de la ranger dans sa poche, avec la lettre, et se lève, attrapant la coupe de liqueur posée en face de lui.  Il se tient droit et aussi fier qu’il peut le paraître.

Sa mère entame alors un discours qu’il connait déjà sans l’avoir entendu. Son pouls s’accélère tout de même un peu plus à chaque parole, assourdissant le monde autour de lui. Il s’étonne soudainement de l’entendre dire : « … Nous avons décidé de marier notre fils…» ; il est confus par le choix des mots qu’elle prononce : « Nous… notre fils ». Comme si son père était toujours vivant. Il n’entend pas vraiment le reste de la déclaration, mais est ramené à la réalité par la dernière phrase : « J’ai donc l’immense plaisir de vous annoncer que mon fils le Prince épousera lady Juliana Savelli à la prochaine lune. Je vous souhaite que les dieux bénissent votre union et vous souhaite beaucoup de bonheur et une descendance nombreuse ! HOURRA ! »

Tout comme sa mère, Lovell boit une gorgée dans sa coupe. La musique recommence, et Juliana, un sourire sur les lèvres (hélas tout aussi faux que celui du jeune Prince), vient se placer à ses côtés. Ce dernier lui adresse un hochement de tête courtois, tandis que la jeune femme se confie : « Nous y voilà donc. Je ne pensais pas que les nobles seraient aussi nombreux ce soir. » Lovell semble se détendre un peu, et tout en finissant son verre pour pouvoir le poser, il répond avec légèreté : « Beaucoup sont là pour profiter du banquet… » Mais le jeune homme connait le protocole qui est attendu concernant les futurs époux royaux, et il s’empresse alors d’en finir avec cette mise en scène avant que la gêne ne s’installe entre eux : « Dansons, ils nous observent. »

Il propose sa main gantée à la jeune femme et la guide vers le centre de la salle. Les nobles et autres invités s’écartent alors pour les laisser passer, tandis que les musiciens changent leur partition pour quelque chose de plus approprié. Il sait que sa mère observe minutieusement le moindre de ses mouvement, et il ne veut pas la décevoir.

Lovell a répété ces gestes des centaines de fois avec une instructrice, mais n’est pas certain de pouvoir les reproduire sans se ridiculiser. Une chose qui le rassure cependant, c’est que malgré qu’il soit plus jeune que la future mariée, il est légèrement plus grand qu’elle. En attendant que la musique ne reprenne, le jeune Prince adresse une révérence à sa promise et vient doucement placer une main dans son dos, caressant sa hanche de son pouce sans le vouloir. Il voit miroiter un bracelet au poignet de Juliana, mais n’a pas le temps de s’attarder dessus car la musique commence, entraînante et légère. Parfaite pour des fiançailles, trop romantique pour la réalité de la situation.

Le brun s’efforce alors de la faire tournoyer, menant la danse comme la coutume l’exige. Un bras derrière le dos, il la fait valser avec une aisance surprenante. Son imposante robe suivant ses mouvements, mais ne le gênant guère. Cette dernière vient les enrouler tous les deux lorsqu'il la fait tourner pour la ramener ensuite à lui, gardant tout de même une distance correcte pour ne pas embarrasser la jeune femme, ou lui-même. Sachant pertinemment que tous le monde les observe, il prononce doucement les mots suivant : « Vous êtes ravissante ce soir, Juliana ».